Les annulations de crédits intervenues le 21 février dernier représentent pour le ministère de la culture une baisse de 4,7% du budget (hors audiovisuel public) après l’annonce d’une augmentation « historique » en trompe l’œil de 5,7%.
En septembre 2023, Rima Abdul Malak avait fièrement annoncé un budget « de transformation et d’inspiration » en progression significative par rapport à 2023. Le décret 2024-124 portant annulation de crédits ampute quatre programmes budgétaires essentiels aux politiques culturelles à hauteur de 204 millions d’euros ventilés comme suit :
- Le programme 131 « Création » perd près de 96 millions d’euros,
- Le programme 175 « Patrimoines » perd plus de 99 millions d’euros,
- Le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la Culture » perd près de 9 millions d’euros, dont de 2 millions sur la masse salariale du ministère,
- Le programme 848 « transformation de l’audiovisuel public », perd 20 millions d’euros.
Les programmes 180 « Presse et média », 334 « Livre et industries culturelles » 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sont quant à eux épargnés.
Ces arbitrages imposés par Bercy impliqueront nécessairement des renoncements en termes de politique salariale, d’emplois internes et externes et de politiques culturelles au sens large.
Des conséquences désastreuses pour le milieu culturel…
Les ambitions de la nouvelle ministre sur la défense d’une culture populaire, et « pour tous », risquent aussi de passer à la trappe -ou d’absorber les crédits d’autres projets…
Les subventions versées aux opérateurs du ministère, les différents projets culturels, les politiques de soutien à l’emploi basés sur le budget initial vont donc être revus à la baisse. Les artistes, les personnels techniques, administratif et d’accueil du spectacle vivant redoutent les dégâts occasionnés sur le spectacle vivant dont la situation est déjà « extrêmement critique », avec comme risques des « rémunérations en berne (…), [un] fléchissement des volumes d’emploi, [une] dégradation des conditions de travail, etc. ».
… et pour les personnels du ministère
La perte sèche de 3,2 millions d’euros de masse salariale aura des répercussions sur l’emploi au ministère (non-renouvellements de contrats et des départs non remplacés) et, potentiellement, sur la politique salariale qui ne doit absolument pas compromettre les engagements pris sur la rémunération des agents contractuel.les du ministère (INRAP et ALBANEL).
Le constat du sous-effectif est déjà alarmant dans tous les secteurs. Les agents s’épuisent pour mener à bien leurs missions : les arrêts maladie sont en hausse de près de 60% entre 2021 et 2022, les indicateurs RPS, se sont eux aussi dégradés (cf. RSU ministériel 2023). Les recours à des expertises RPS ou à des audits socio-organisationnels augmentent, démontrant un mal-être croissant, dont une des causes, outre les problématiques de management et d’organisation du travail, est la surcharge de travail au ministère.
Une escroquerie intellectuelle, un non-sens économique
Selon le gouvernement, une croissance inférieure de 0,4 % à celle attendue nécessite cette réduction de 10 milliards d’euros sur les dépenses publiques. Alors qu’il devrait soutenir et développer le secteur public en cessant d’appréhender leurs coûts comme une « dette », ce gouvernement s’évertue donc à les dégrader. Il devient alors urgent de priver les citoyens d’une part de leur service public pour ne pas « laisser s’envoler la dette publique » – en usant au passage d’une disposition de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) qui permet d’éviter tout passage devant les parlementaires…
Une nouvelle fois, la population sera donc priée de se laisser tondre la laine sur le dos au nom d’un argumentaire dont le dogmatisme flirte avec la dérive sectaire, car dans un système où les dépenses des uns font les revenus des autres, baisser les dépenses publiques aura forcément un impact négatif sur le PIB… et donc sur la croissance.
Une fois de plus, le gouvernement n’envisage le retour à l’équilibre budgétaire que par la réduction des dépenses. Au lieu de s’en prendre aux services publics, aux ménages, salarié.e.s, retraité.e.s, jeunes et privé.e.s d’emploi, le gouvernement devrait au contraire réduire les aides publiques massives et non conditionnées versées aux entreprises, taxer les dividendes et imposer les plus fortuné.e.s.
La solution de l’augmentation des recettes par une fiscalité plus juste reste un sujet tabou chez les amis des ultra-riches…
Nous appelons tous les personnels à se mobiliser pour la défense du ministère et des services publics en participant en masse à la journée d’action Fonction publique
le 19 mars prochain !
Communiqué_CGT-Culture et Spectacle_annulation de crédits_01032024