Négociations » Indemnités : C’est pas encore le paradis, d’autant que le Père Fouettard est dans la maison !

La seconde réunion relative au régime indemnitaire a eu lieu le 26 mars dernier. Quelques jours après la puissante mobilisation du 22 mars, l’administration commence enfin à prendre en considération les éléments apportés par les organisations syndicales sur les inégalités indemnitaires qui traversent notre ministère.

Pour autant, la bataille est encore loin d’être gagnée. Si la moitié des crédits dévolus au rattrapage indemnitaire est réellement consacré à cette priorité, l’autre moitié va purement et simplement au CIA qui est tout sauf un outil de justice ! Tel est le choix de l’administration alors que l’ensemble des organisations syndicales ont demandé que l’ensemble des crédits, soit 7 millions d’euros pour 2018, soient destinés aux mesures concrètes de rattrapage et donc à la mise en œuvre de l’alignement par le haut des socles ministérielles par catégorie et leur revalorisation. C’est pas tout à fait gagné mais ensemble on peut y arriver !

Une nouvelle note de gestion
La rédaction d’une nouvelle note de gestion est prévue pour  :
● intégrer dans les annexes les nouveaux corps qui vont intégrer la RIFSEEP ;
● modifier les montants de socle IFSE minimum des agents de catégorie C ;
● intégrer des modifications des règles d’éligibilité à une revalorisation IFSE pour mobilité.
La date de publication de cette note de gestion n’a pas été communiquée.

Réduire les disparités
Les documents, qui ont été envoyés à l’avance cette fois contrairement à la réunion du 31 janvier où ils avaient été remis sur table …, ont pris en compte quelques éléments avancés par nos soins dans les premières réunions.
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1er axe : réduire les disparités constatées entre les filières

Coût estimé à 2 millions euros 1

En 2018, campagne de revalorisation IFSE pour absence de mobilité pour les filières scientifique et documentaire, de manière rétroactive depuis le 1er juillet 2017, soit 18 mois de mise en œuvre et ensuite pour les filières recherche et bibliothèque à compter du 1er juillet 2018.

La publication des socles dont l’examen est actuellement en cours au guichet unique du Ministère de la Fonction publique est toujours en attente ; si le principe est acté d’une revalorisation et d’une rétroactivité, l’incertitude sur la date de publication de ces éléments est bien réelle.
Alignement des barèmes IFSE de la filière bibliothèque du Ministère de la Culture sur ceux de la filière bibliothèque du ministère de l’enseignement supérieur ; l’administration Culture est en attente de la publication des textes de l’enseignement supérieur, validés à leur Comité technique ministériel, déposé au guichet unique de la fonction publique. Mais alignement ne signifie pas revalorisation !

Nouvelle mesure d’alignement du montant du socle IFSE minimum des agents de catégorie C sur celui des adjoints administratifs d’administration centrale. L’écart peut aller de 16 à 38% sur les montants minima des socles : 415 agents seraient concernés (hors Louvre et BnF) dont environ 300 agents de surveillance. Du coup, la modification des socles minima doit être faite et sera la suivante :

● Surveillance :
groupe 1 : de 2100€ à 2700€
groupe 2 : de 2000€ à 2500€ (montant administration centrale)

● Adjoint technique des Administrations de l’Etat :
groupe 1 : 3600€ (car recrutement métier art et application du protocole)
groupe 2 : de 2000€ à 2500€

● Magasinier bibliothèque :
groupe 1 : 2700€
groupe 2 : 2500€

Ces nouveaux socles seront applicables à la publication de la note de gestion alors que, selon nous, ils devraient l’être a minima au 1er janvier 2018.

Attention : après vérification, la modification des nouveaux socles minima ont aussi un impact sur les socles de la catégorie B, exemple groupe 3 – 2500€ et groupe 2 – 2700€ (montant similaires donc avec la catégorie C), mais l’administration n’a pas évoqué cette problématique.

Rappel : au Ministère de l’intérieur, le socle indemnitaire IFSE le plus élevé en catégorie C est 5471 euros, 7622 euros en B et 12690 euros en A…
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2ème axe : réduire les disparités constatées entre les agents au sein des mêmes filières

coût estimé à 1,6 million euros ;

Transfert d’une partie des crédits vers les établissements publics.
Depuis la dernière réunion, une séance de travail avec les établissements a été réalisée ; un million serait dédié au Louvre (440 000 euros), à la BnF (540 000 euros ) et à Orsay sur le principe « pas d’égalité stricte mais équité de principe ». C’est la volonté pour le SRH du Ministère de s’assurer que les établissements aient les moyens propres pour effectuer le versement d’un socle commun sans pour autant souscrire au principe de l’alignement par le haut.
En réalité un million d’euros ne suffit pas et la tutelle demande aux établissements de dégager des marges sur leur masse salariale pour appliquer ces mesures de revalorisation au détriment d’engagements potentiels pris précédemment pas ces établissements.

Alignement à compter du 1er janvier 2018 pour les agents de tous les corps de la filière administrative sur les socles ministériels IFSE les plus élevés de chaque catégorie : coût de 0,5 million euros.

Précision : la notion de socle est importante, car elle n’oblige pas l’administration à revaloriser tous les agents. Elle ne va revaloriser que les agents qui n’atteignent pas le socle ministériel IFSE minimal.

Mise en œuvre d’un mécanisme de compensation des inégalités salariales entre les femmes et les hommes : coût estimé à 100 000 euros
Une étude réalisée sur la filière surveillance pour les titulaires (modification de l’IFSE) et les agents non titulaires (modification des contrats) a été réalisée par l’administration. La première réunion de travail sur le sujet a été tenue (définition des requêtes) et le souhait est de finaliser les travaux de requête pour juillet. La volonté affichée de traiter également titulaires et contractuels va dans le sens de l’égalité de traitement. En outre, et ce n’est pas rien, la volonté politique de compensation des inégalités femme homme et sa compensation dès cette année sont suffisamment rares pour être soulignées.

Nouvelle mesure : modification des règles d’éligibilité à une revalorisation IFSE pour la mobilité. Une nouvelle rédaction dans la note de gestion sera faite. C’est une demande des bureaux de gestion afin de faire face à des situations individuelles qui seraient « des trappes » ; l’idée est d’assouplir les règles d’éligibilité au dispositif pour faire bénéficier les agents qui n’ont pas de mobilité pendant une durée donnée, et quelle qu’en soit la cause, mais pour ne pas les empêcher de bénéficier de l’IFSE mobilité s’ils font l’objet d’une mobilité à un moment donné. Un peu compliqué mais l’opacité du RIFSEEP associé à sa complexité aboutie à créer des situations individuelles difficiles à régler mais pour autant à prendre en compte.
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3ème axe : développement du Complément Indemnitaire Annualisé

CIA : du Père Noël au père Fouettard !

coût estimé à 3,4 millions d’euros, soit 48% des mesures indemnitaires 2018 !

Le désaccord avec les organisations syndicales est profond sur le complément indemnitaire annualisé tant sur le fond que la forme. L’administration se donne bonne conscience en portant le constat d’avoir réalisé un effort pour rééquilibrer les montants indemnitaires dans le socle suite aux premières réunions et à nos demandes répétées et en conséquence, elle s’autorise, comme « un ours dans un pot de miel », à taper dans les crédits de rattrapage pour développer une politique managériale fondée sur l’individualisation des carrières et la tête du client.
Toujours pour l’administration et avec une arrogance certaine, c’est une « nécessité » de mettre en œuvre la généralisation du CIA.
Pourtant, l’administration a changé son fusil d’épaule : il y a peu, la cheffe du SRH du ministère avait affirmé que le CIA ne serait pas utilisé pour autre chose que la prime de fin d’année, une sorte de véhicule du père Noêl.

Le CIA devient le véhicule du Père Fouettard !

Pour le secrétaire général, « c’est un grand pari» ; d’après lui, le CIA va déclencher « un mécanisme vertueux » qui se résume au fait que l’évaluateur aurait plus à cœur avec l’agent de s’impliquer dans l’évaluation en raison de l’impact financier concret sur l’évaluation professionnelle (sic !!!). C’est hélas, les grandes tendances du management public d’inspiration autant réactionnaire que libérale et qui consiste à développer la rémunération individualisée pour mettre en oeuvre des pratiques managériales qui ne correspondent en rien à l’ensemble des dispositions du service public et du Statut Général mais surtout pour rémunérer moins le travail en tout état de cause. C’est aussi l’aveu que les politiques de revalorisation des carrières, taux de promotions notamment, sont très médiocres au ministère en raison d’une stratégie perdant/perdant des plus hautes autorités politiques comme administrative du ministère.

Quid du non versement du CIA

Bien qu’en désaccord profond avec ce dispositif et ne sachant toujours pas sur quel critère les montants de versement pourraient varier, nous avons évoqué différentes situations qui pourraient aboutir au non versement du CIA :
Il nous a été dit que l’absence de versement de CIA nécessite un rapport circonstancié de la hiérarchie. En cas d’absence d’entretien professionnel, l’agent ne devra pas être disqualifié et recevra bien un versement correspondant au CIA.
Toutes ces informations auraient été données à tout encadrant au moment du lancement de la campagne d’entretien professionnel qui a pour objectif d’introduire le CIA avec un versement en septembre 2018. Beaucoup d’encadrants n’en peuvent plus des instructions de ce genre totalement en décalage avec la réalité du travail et qui ne correspondent en rien à leurs attentes ni à celles du personnel. Les phantasmes managériaux du secrétaire général épuise les personnels et la hiérarchie de terrain.

La culture hors-sol coûte chère !

Les organisations syndicales n’ont pas été sollicitées par l’administration sur cette modification des modalités de l’entretien professionnel et encore moins sur les conséquences sur les collectifs de travail et les coopérations. Avons tout juste été informés une semaine avant de la mise en place du dispositif dont nous avons demandé la suppression et le transfert des crédits dédiés au CIA à des mesures pérennes qui sont la revalorisation des socles et l’alignement sur le socle le plus haut de chaque catégorie, ce qui correspond à la philosophie du rattrapage pour faire simple. Ce sont près de 3,4 millions d’euros qui sont en jeu.
Pour la Cgt-culture, il n’est pas possible que 50 % des crédits dévolus au rattrapage, et présentés en tant que tels par la ministre et son orchestre, soient destinés à une mesure basée sur la modulation, l’injustice et la tête du client, en trois lettres, le CIA !
Evidement, en termes d’argent public, ce dispositif a un coût moins élevé que d’autres, comme les taux de promotions qui valorisent la carrière, parce que les primes sont peu comptabilisées dans le périmètre de cotisations des pensions. En conséquences, la masse salariale du Budget de l’Etat, y compris les pensions, voient leur montant baisser à termes. Ne jamais oublier que le gouvernement veut faire 60 milliards d’euros d’économie d’ici 2022.
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Les mesures pour les contractuels
L’administration dit travailler également sur la part variable des agents contractuels, pour ceux qui en ont, dans le sens d’une revalorisation qui pourrait faire un peu « oublier » l’épisode de la fin d’année 2017 subtilement mis au point en chambre par l’armée de technocrates qui nous dirigent …
mais la situation est bien plus complexe qu’il n’y paraît et très hétérogène ; il existe des contractuels avec un régime indemnitaire similaire aux fonctionnaires (CNC et Inrap), d’autres avec une part variable (contractuels du budget du ministère bénéficiant du dispositif Albanel) et enfin, d’autres contractuels sans rien du tout. C’est bien en partant de la réalité des choses que nous corrigerons les injustices sur le fondement désormais célèbre, « à travail égal, salaire égal ! »

Sauvadet : toujours un poids et deux mesures
La mesure Pompidou qui consiste en un maintien de la rémunération reste circonscrite … à Pompidou, le ministère refusant de bouger d’un pouce. Il se retranche derrière les textes ; catégorie C maintien à 100%, pour les B et les A, maintien quasi assuré entre 92 et 95%. ces textes n’empêchent aucunement d’améliorer la situation.
Le hic est que 5 % à 8 % de la rémunération peut corresponde à plusieurs centaines d’euros par mois ; en outre, cela touche principalement des femmes et par ailleurs c’est d’une très grande injustice par rapport à l’arbitrage « Pompidou » et aux usages dans les autres ministères, voire même au sein du ministère…
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Il ne fait aucun doute que l’analyse et la légitimité des revendications ont permis de faire avancer la discussion – et nous sommes bien optimistes quand nous parlons de négociations…- mais aussi et bien sûr la mobilisation des personnels depuis de nombreux mois et encore dernièrement.
Pour autant, ne baissons pas la garde, restons vigilants dans l’unité la plus large et gagnons nos revendications.
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Nous exigeons pour les personnels du ministère de la Culture :

• l’alignement par le haut sur les socles ministériels les plus élevés de chaque catégorie ;
• la revalorisation des socles ministériels Culture en fonction des socles déjà existants et plus favorables dans d’autres ministères où il existe des différences de 3 000 euros supérieurs …
• corrections des inégalités femmes hommes ;
• le maintien des rémunérations des contractuels du dispositif Sauvadet ;
• la mise en œuvre du principe « à travail égal, salaire égal » entre contractuels et titaulaires ;

Nous exigeons pour les personnels de la Fonction publique :

• la garantie du pouvoir d’achat par une revalori­sation immédiate de la valeur du point d’indice et la refonte de la grille pour des carrières attractives comme vecteur le plus juste d’une recon­naissance collective du travail des agents ; c’est sur ces points que le gouvernement et les employeurs publics doivent porter l’effort financier ;
• La suppression du RIFSEEP et de toute forme de modulation des régimes indemnitaires et de la rémunération liée au mérite ou à l’évaluation professionnelle ou à l’intéressement collectif ;
• De mettre fin à l’augmentation de la part des primes et indemnités dans le traitement ;
• L’intégration des régimes indemnitaires com­muns, ayant le caractère de complément salarial, dans le traitement brut, permettant leur prise en compte dans le calcul de la pension ; dans l’attente de la sa­tisfaction de cette revendication, harmonisation par le haut des régimes indemnitaires des différents minis­tères ;
• Le transfert « prime/point », initié en 2016 dans PPCR de manière tout à fait insuffisante, doit se pour­suivre et s’amplifier sans impacter les revalorisations indiciaires ;
• La prise en compte des autres primes ou indem­nités (non intégrables dans la grille indiciaire au titre des qualifications) sous la forme d’un complément de pension d’origine indemnitaire fondé sur les règles du Code des pensions civiles et militaires ; ces primes qui prennent en compte des sujétions, contraintes ou res­ponsabilités particulières liées à l’exercice de certaines missions, doivent être définies et limitées, à défaut de ne pouvoir être compensé autrement.

Vive la Culture et que vive le Ministère de la Culture

Paris, le 26 avril 2018, 13h