Madame la Présidente de la Commission administrative paritaire des adjoints administratifs,
La situation générale et le contexte des réformes
Nous sommes arrivés en fin de mandat et les élections professionnelles du 6 décembre 2018 rebattrons les cartes de la représentation syndicale. La participation des agents à ce rendez-vous démocratique tiendra une place centrale. Une fois encore, la CGT-Culture invitera les personnels à voter massivement. Il en va en effet de leur représentation, notamment dans cette instance, et de leur capacité à peser avec force dans les débats.
Notre ministère est touché de plein fouet par des réformes multiples et de grande ampleur : Action Publique 2022, un énième avatar de la réforme de l’État ; un nouveau cycle de réforme de l’organisation territoriale de l’État ; le chantier administration centrale stratège ; le transfert des crédits vers les DRAC ; le transfert de la gestion de la carrière et de la paie des agents titulaires et contractuels inscrits au budget de l’État vers leurs établissements publics d’affectation (gestion directe) ; le projet CAMUS… N’en jetez plus !
Ces réformes tous azimuts vont impacter considérablement la vie professionnelle des personnels. Des missions vont être supprimées et transformées. Des déménagements vers d’autres sites et des mobilités forcées vont chambouler des vies personnelles comme ce fut déjà le cas pour la fusion des DRAC.
Les prestations sociales sont aussi attaquées comme l’allocation monoparentale qui est désormais assujettie à l’impôt dans les établissements publics. Ce qui, de fait, conduit beaucoup d’agents à y renoncer et ajoute de la précarité à des situations déjà compliquées.
La réforme des CAP, une autre réforme inacceptable
Dans ce contexte déjà particulièrement tendu et anxiogène, les CAP ne sont pas épargnées. On peut même dire en toute objectivité qu’elles sont menacées dans leur forme et leur philosophie actuelles. La DGAFP a en effet présenté un projet de réforme des CAP dont les termes, tout droit sortis du dictionnaire de la langue de bois, sont néanmoins sans ambiguïté : « adapter les attributions et le rôle des CAP sur les actes de la carrière des agents » ou encore « moderniser les modalités de composition et de fonctionnement des CAP ».
Rappelons-le au besoin : les CAP traitent de toutes les questions relatives aux carrières individuelles des personnels (mutations, promotions, titularisation, sanctions, notations…). Elles sont également des lieux de dialogue social où sont discutées les modalités de traitement des carrières des agents.
Or, en vérité, l’administration considère depuis longtemps que le fonctionnement des CAP est trop lourd et que la marge de manœuvre des chefs de service – c’est-à-dire leur pouvoir discrétionnaire – est insuffisante. En vérité, cette réforme des CAP vise à réduire les prérogatives des représentants des personnels. Cette réforme vise à vider les CAP de leur substance. Elle constitue une attaque explicite et insupportable contre la transparence des décisions administratives et la garantie d’égalité de traitement des agents ; deux notions pourtant essentielles à la Fonction publique.
Cette réforme des CAP porte atteinte au dialogue social et à la justice sociale. Nous allons donc la combattre avec la plus grande fermeté.
Mais revenons-en à présent au corps des adjoints administratifs
Il nous semble indispensable de disposer aujourd’hui d’un état des lieux contradictoire de la situation du corps des adjoints administratifs. Vous devez faire droit à cette demande sans attendre.
Les élus font pour leur part un bilan sans appel. Les effectifs du corps des adjoints administratifs ont fondu comme neige au soleil. Si nous étions encore 1842, fin 2014, c’est-à-dire au début de ce mandat qui s’achève, nous ne sommes plus que 1476 à ce jour.
Les agents que nous représentons doivent savoir que nous vous interrogeons sans relâche sur cette situation très dégradée et que vous refusez systématiquement de nous répondre.
Si encore vous pouviez arguer du fait que tous les adjoints manquant ainsi à l’appel ont été promus en catégorie B dans le corps des secrétaires administratifs, ce serait un début d’explication. Mais ce n’est malheureusement pas le cas, loin s’en faut. Le repyramidage qui l’aurait permis n’a jamais vu le jour. Les promesses que vous nous avez faites durant quatre ans sont restées vaines.
Nous voulons réaffirmer notre opposition au CIA
Le corps des adjoints administratifs, comme tous les autres, est directement concerné par l’arrivée du CIA qui n’est autre qu’une prime au mérite qui ne dit pas son nom.
Sujet d’actualité brûlant et pour cause : sans surprise, la mise en paiement du CIA fin septembre et les lettres de notification reçues par les agents ont déjà eu un effet délétère sur le climat ambiant dans les services. Ce nouveau dispositif discrétionnaire et opaque est un facteur de division des agents et une machine absurde à démotiver.
Les CAP ne s’occupent pas a priori du régime indemnitaire. En revanche, quand nous allons devoir dénoncer les inégalités de traitement consécutives au CIA et justifiées par la mention prévue à cet effet dans l’entretien professionnel, c’est bien dans cette instance et nulle part ailleurs que l’échange aura lieu. Car si pour certains tout semble aller pour le mieux, d’autres, qui n’ont pas l’heur de plaire à leur hiérarchie, doivent se serrer la ceinture et sont au pain sec et à l’eau.
Des taux de promotion scandaleux
Et ce ne sont pas les taux de promotion qui vont améliorer l’ordinaire. Nous le redisons une fois encore : leur niveau est scandaleusement bas. Il appartient à l’autorité politique d’aller négocier ces taux avec leurs homologues de Bercy. Les agents et leurs représentants sont légitimes à l’exiger et à l’exiger encore car, jusqu’à présent, la Culture n’obtient que des miettes. Dans ce domaine aussi, nous allons de Charybde en Scylla, tous les trois ans c’est la dégringolade !
Les adjoints du ministère de la culture ont pourtant déjà l’un des régimes indemnitaires les plus bas de la Fonction publique. A croire qu’ils ont moins de valeur que les autres. Cela ne peut plus durer !!!
Des métiers qui changent sans que vous n’en teniez compte
La transformation du ministère de la culture et l’évolution de ses métiers demandent aux adjoints administratifs toujours plus de connaissances et d’expertise. Ils doivent s’adapter au changement, monter en compétence, accepter de passer de service en service. Ils doivent par ailleurs composer avec un turn-over important à la tête des services et des directions.
L’arrivée et/ou la montée en puissance de nouveaux outils de travail – nous pensons en particulier au développement de GOIA vers une dématérialisation totale du courrier -, l’évolution des missions, de l’organisation et des procès de travail, toutes ces réalités nouvelles et incontournables exigent que vous présentiez de manière urgente un plan de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, ainsi qu’un plan de formation ad hoc.
C’est l’avenir de ce corps qui est en jeu mais aussi celui de toute la filière administrative.
Vers une prison statutaire
Si la gestion directe, que nous combattons, devait advenir, les agents d’un établissement public rémunérés sur le titre 3 auraient demain toutes les peines du monde à passer vers un service du ministère et à revenir sur un emploi rémunéré sur le titre 2. C’est au demeurant déjà le cas pour les agents du musée du Louvre ou de la BNF.
Il y a là une double injonction contradictoire tout à fait étonnante : alors que depuis des années nos dirigeants n’ont de cesse de prôner la mobilité des agents afin de lutter soi-disant contre l’inertie de la Fonction publique, ils se préparent à enfermer demain les personnels concernés dans une espèce de prison statutaire.
Le projet de transfert de la gestion de la carrière et de la paie des agents titulaires et contractuels inscrits au budget de l’État vers leurs établissements publics d’affectation (gestion directe) doit être abandonné.
Quid de la dérégulation des procédures de recrutement
A ce paysage déjà suffisamment morose, s’ajoute la non-application de l’article 60 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984, et le clientélisme que nous constatons en ce qui concerne les recrutements. N’avons-nous pas constaté ici à plusieurs reprises que certains recruteurs préfèrent recruter des contractuels en lieu et place de fonctionnaires pourtant dûment formés et compétents.
S’agissant des mobilités, de plus en plus souvent, les agents de notre ministère doivent passer leur tour au profit de personnels extérieurs à la Culture. Si la mobilité interministérielle est parfaitement légitime, nous sommes en droit de nous interroger quant aux motivations de ces recrutements. Ainsi, il n’est pas rare d’entendre que l’agent retenu saura immédiatement s’adapter au poste et qu’il sera opérationnel de suite. Nous dénonçons ces arguments car notre ministère, complexe de par sa structure, a su se doter d’un service de formation performant pouvant s’appuyer sur une commission de formation ministérielle qui attache la plus grande importance à des formations qualifiantes permettant justement à « nos agents » de s’adapter immédiatement aux postes.
Pourtant, à grand renfort de communication, notre ministère a mis en avant l’obtention de la double labellisation, la non-discrimination, la mise en place de l’égalité femmes-hommes, et de manière générale l’égalité de traitement des agents. Cette instance et ses élus devraient être les témoins de la concrétisation de ces politiques louables mais ce n’est hélas pas le cas.
Siéger dans cette instance est un honneur, c’est aussi une lourde responsabilité et un combat de tous les instants. Au terme de ce mandat, le moins que l’on puisse dire c’est que nous restons sur notre faim, tant il reste encore à faire.
Les adjoints administratifs peuvent nous faire confiance. Notre détermination est intacte. Nous allons continuer à nous battre pour aller vers de meilleures conditions de travail, vers un régime indemnitaire à la hauteur de leur professionnalisme et leurs compétences. L’engagement et l’attachement de nos collègues au ministère et aux politiques publiques de la culture doivent être reconnus et récompensés.
Paris 16 octobre 2018