C’est avec une infinie tristesse que nous avons appris la disparition de notre camarade Jean-Christophe Ton-That. Jean-Christophe nous a quittés dans la nuit de dimanche à lundi après une lutte acharnée contre ce qu’on appelle pudiquement une longue maladie.
A 55 ans à peine, Jean-Christophe laisse une famille anéantie. Nos meilleures pensées et toute notre compassion vont d’abord à son épouse et à leurs trois enfants. Notre chagrin est aujourd’hui empreint de colère. Quels mots pourraient suffire en effet à témoigner d’une telle injustice et à panser cette terrible blessure infligée par la vie.
Face à ce sentiment d’impuissance ô combien douloureux, il nous reste cependant la mémoire vive de notre camarade, de sa personnalité si attachante, de son parcours et de ses engagements exemplaires.
Et l’on se souviendra longtemps de Jean-Christophe comme d’un grand serviteur de l’État. Arrivé au ministère de la culture en 1993 par la porte des Archives Nationales, il rejoindra ensuite le monde des musées avec la même passion du service public de la culture.
Chargé d’études documentaires, Jean-Christophe travaillait depuis 1999 au musée de Cluny, le musée national du Moyen Age à Paris où il dirigeait le centre documentaire. Dire qu’il était apprécié de la communauté des musées est un doux euphémisme. Bien qu’infiniment discret et humble, dans sa partie, Jean-Christophe faisait autorité. Avec calme, sérénité, empathie et une finesse d’esprit pénétrante, il faisait entendre inlassablement une certaine idée des politiques publiques culturelles et des responsabilités publiques.
A partir de sa place essentielle au musée de Cluny, Jean-Christophe parlait merveilleusement bien du rôle des musées dans notre société, de leur ouverture sur la cité, de leur ouverture à toutes et tous par-delà les différences sociales, et, au fond, de leur universalité dans le partage et le respect des cultures.
Pour Jean-Christophe, l’engagement et l’exigence professionnels allaient de pair avec l’engagement et les convictions syndicales. N’étant pas de ceux qu’une bourrasque en opportunité suffit à retourner, fidèle à lui-même et à ses idées, il savait faire entendre avec sagesse, courtoisie mais fermeté toute l’importance de défendre et de renforcer le réseau des musées nationaux. Il savait faire entendre toute la modernité, les réalités et les potentialités nouvelles d’un service public des musées adossé notamment au statut de service à compétence nationale. Il n’avait pas son pareil pour mettre en perspective un musée du XXIe siècle tourné vers les publics, tous les publics, la citoyenneté et l’expression concrète des droits culturels.
La trajectoire professionnelle et militante de Jean-Christophe fut jalonnée de nombreux mandats électifs et des premières responsabilités syndicales à la CGT. Loin probablement d’être exhaustifs, on se souviendra immanquablement qu’il fut secrétaire général de la section du musée de Cluny, membre de la commission exécutive de la CGT-Culture à plusieurs reprises, qu’il compta en 2015 parmi les membres fondateurs du Syndicat National des Musées et Domaines.
Au début des années 2000, Jean-Christophe représenta les personnels au Comité technique paritaire ministériel et parallèlement au Comité technique paritaire de la Direction des Musées de France. Après la RGPP, il fut élu au Comité technique paritaire de la Direction Générale des Patrimoines, puis, récemment encore, au Comité technique de la filière musée.
Mais c’est assurément dans son mandat de toujours à la Commission administrative paritaire des chargés d’études documentaires qu’il put exprimer au mieux cette noble idée : avoir de l’ambition et des revendications offensives pour les politiques publiques culturelles est encore le meilleur moyen de transformer les choses à hauteur des métiers, des missions des personnels, du sens de leur travail et de leurs conditions de travail. Nombreux sont ceux qui ont pu bénéficier de son écoute bienveillante, de ses conseils et de son soutien.
Jean-Christophe restera une figure majeure, inoubliable de la CGT-Culture. Nous ne sommes pas près d’oublier, sa voix, son sourire, son humour parfois grinçant et si vivifiant, son amour des idées et des autres, sa générosité sensible, sa présence élégante et pudique.
Jean-Christophe était aussi un militant très engagé et impliqué dans la vie associative, scolaire et politique de sa commune Athis-Mons. Encore récemment et durant le mouvement des gilets jaunes, il manifestait chaque samedi contre les injustices sociales, pour l’honneur des travailleurs et un monde meilleur.
Jean-Christophe, tous tes camarades et tes amis te saluent fraternellement. Ton départ est inconcevable. Nous sommes inconsolables mais tellement heureux et fiers de t’avoir connu. Va en paix et dans l’amour inextinguible des tiens.
Paris, le 7 octobre 2021