Textes de congrès du SNSD-CGT

Syndicat National des Services Déconcentrés de la Culture

ORIENTATIONS 2025 – 2029

Texte du Ve congrès du SNSD CGT Culture 24-26 juin 2025

Les services déconcentrés de la culture dans la tourmente libérale

Les DRAC et DAC appliquent la politique du ministère en régions sous la double tutelle : administration centrale et préfectures de régions. Elles concentrent donc toutes les compétences et toutes les filières métiers du Ministère de la Culture. La charte de déconcentration définit le rôle respectif de chaque tutelle avec, depuis 2015, un fort accroissement du pouvoir des préfectures au point d’éclipser celui du ministère.

Nous constatons la perte d’autonomie en communication. Sont désormais sous la responsabilité des préfectures de régions : la répartition des budgets de subvention, les budgets de fonctionnement (y compris ceux de déplacement ce qui n’est pas sans poser de problème pour l’exercice des missions), de travaux dans les locaux, la répartition des effectifs, la mutualisation des moyens et organisation des services, les projets de service, Une vision interministérielle et territorialisée de la culture sous la tutelle du ministère de l’intérieur prend donc le pas sur une politique nationale menée par celui de la Culture.
Les Secrétariats Généraux des DAC de l’outre-mer et la logistique de la Drac IdF ont été absorbés dans des SG communs (SGC) avec les préfectures, bureaucratisant toutes les démarches professionnelles des agents. Ce processus a même abouti à l’absorption de la DAC Guyane dans une direction des populations où le ministère n’exerce plus de tutelle. C’est la fin des politiques culturelles sur ce territoire.

Durant les 4 dernières années, le SNSD perçoit à travers les grandes lignes des politiques publiques de décentralisation et de déconcentration les stigmates des mesures lancées par le gouvernement depuis la Loi Organique des Lois de Finance.
Les changements notés pointent les transformations d’une politique de la culture où déconcentration et décentralisation divergent, s’évitent ou s’opposent plutôt que de s’articuler harmonieusement, produisant ainsi des dysfonctionnements dans la pratique des métiers des agents du ministère de la Culture.

Depuis 2017, une déstructuration du service public de la culture s’impose à marche forcée, avec pour effet :

  1. L’impact direct sur le statut des agents et leurs salaires,
  2. La recentralisation autour d’une politique d’appels à projets nationaux,
  3. Des dysfonctionnements des relations cabinet/centrale/ DRAC et DAC,
  4. Une accélération de la libéralisation de l’offre culturelle, notamment dans l’EAC, à l’exemple du Pass Culture et des Microfolies sous forme de « ruissellement » au niveau des régions. Le financement de la culture passe plus par des structures de type start-up au détriment du budget des DRAC qui diminue de 15% en 2025 dans le domaine de la démocratisation culturelle.

Actuellement aucune transformation dans le Ministère ne se fait dans la concertation avec les services, les représentants du personnel et les publics impliqués. Il en est ainsi de la nouvelle direction de l’Enseignement supérieur et de la Démocratie Culturelle voulue par la ministre Rachida Dati.

La gestion des locaux par la Direction Immobilière de l’État (DIE) a entraîné de nombreux regroupements d’UDAP dans des cités administratives ou préfectures, ainsi que des concentrations de personnel dans les espaces de travail. Les nouveaux locaux s’accompagnent souvent d’une perte d’image et d’une diminution des rendez-vous avec les pétitionnaires. Les relocalisations dans les bâtiments de préfecture posent de nombreux problèmes d’accès au public ce qui entraîne des tensions avec les personnels. Après les UDAP, c’est au tour de deux DRAC de subir ce type de regroupement.

Depuis la fusion des régions l’organisation des DRAC a été modifiée en profondeur : rajouts d’échelons intermédiaires entraînant un allongement des chaînes hiérarchiques, organisation multi- sites qui ne facilite pas le travail et augmente le nombre de déplacements.

Certaines collectivités territoriales souhaitent prendre directement en charge une partie des missions des DRAC, à l’instar de la Bretagne pour les industries culturelles (cinéma, livre et lecture) ou encore la région PACA avec la tentative de récupération de l’ensemble des missions du ministère de la Culture. D’autres collectivités territoriales se désengagent de la culture, mettant en péril la co- construction des politiques publiques et de nombreuses structures dépendantes de financements culturels.

En termes de politiques publiques, l’inégalité d’accès des citoyens à la culture perdure et s’aggrave du fait de la métropolisation, en dépit des effets d’annonce du Plan Culture Ruralité.
Les DRAC/DAC répondent de plus en plus de manière bureaucratique aux différents partenaires. La préoccupation de démocratisation de la culture est le plus souvent absente de la réflexion en DRAC/DAC et n’oriente pas les choix organisationnels et la répartition budgétaire.
Au lieu d’une élaboration des politiques publiques entre administration centrale et services déconcentrés que nous appelons de nos vœux, une déconcentration des labels et autres dispositifs nationaux affaiblissent considérablement l’administration centrale et l’expertise nationale. En DRAC, le travail s’accroît sans effectifs supplémentaires et la seule boussole devient la préfecture.

Les mutations numériques ne simplifient pas le travail des agents et apportent le plus souvent de la lourdeur, cela est particulièrement vrai pour Chorus, Chorus DT, ARP., Patronum et Démarches Simplifiées. L’omniprésence de l’outil informatique provoque un repli sur soi des agents, un manque d’échanges entre collègues et abîme les collectifs de travail. La charge mentale induite par leur utilisation massive augmente considérablement. Le SNSD demande que le ministère sorte de l’emprise des GAFA.

La politique RH en DRAC/DAC tend à une contractualisation des emplois et augmente la précarité des personnels. Dans le même temps, elle pénalise les agents statutaires dans leur mobilité et leur déroulé de carrière.
A l’issue des réussites de concours, les prises de postes devraient se faire au maximum sur site.

Sous ces effets conjugués, les conditions de travail se dégradent avec perte de sens des missions, isolement accru, sentiment d’insécurité et de dépossession multipliant les cas de souffrance ou de surmenage. Rappelons que le travail est un acte social et que le SNSD tient à préserver ces valeurs.

Les instances représentatives des personnels jouent souvent le rôle de chambre d’enregistrement et parfois découragent l’implication militante. Pour autant, depuis les élections professionnelles de 2018, La CGT est le seul syndicat avec un réseau national dans les services déconcentrés. En 2022, le référendum a conforté la première place de la CGT dans les services déconcentrés et montre l’attachement des agents au dialogue social avec un taux de participation de 73 % en moyenne.

Contre l’ultra libéralisation de la culture, le SNSD CGT-Culture imagine les DRAC/DAC comme porteuses de la mixité sociale, du vivre ensemble, du développement de l’éducation culturelle pour tous, tout au long de la vie. La culture permet de créer du désir et de l’envie parmi les populations délaissées sur tous les territoires, elle décloisonne et devient un vecteur d’émancipation personnelle et sociale. La culture c’est aussi penser le patrimoine comme un tout.

Nos orientations, nos priorités, nos revendications

  • Maintenir les DRAC et DAC avec toutes leurs prérogatives dans chaque région et préserver des sites distants généralistes qui reprennent la totalité des fonctions des Drac sans spécialisation afin de garantir un service public de qualité et de proximité ;
  • Obtenir du ministère un mode de fonctionnement optimisé entre Ministre de la culture et son cabinet / centrale / DRAC-DAC pour renforcer la cohérence du ministère dans la mise en œuvre des politiques publiques. Le document d’objectifs prioritaires (faisant office de DNO) est inadapté et n’a pas de force politique. Le SNSD demande à ce titre la mise en œuvre de la charte de déconcentration du 8 mai 2015 – article 9 ;
  • Redonner toute sa place au Ministère contre le pouvoir exorbitant des préfets et face au désengagement de nombreuses collectivités territoriales hors du champ culturel.
  • En vertu de la loi LCAP, la programmation et les subventions prescrites par les agents des DRAC doivent être respectées par les préfets. Exemples d’interventionnisme : contrôle du courrier et des dépenses des DRAC/DAC par les préfets, limitation et négation des droits culturels des jeunes par des mesures interventionnistes de certaines préfectures, etc.
  • Militer pour le retour au plein exercice des DAC en Outre-Mer qui subissent de manière exacerbée l’emprise des préfectures – voire une forme de gouvernance néo-colonialisme ;
  • Militer pour le retour des fonctions administratives au sein des DAC, y compris les moyens humains, matériels et financiers transférés au SGC ;
  • Se battre contre la mise en place des SGC et stopper toutes les expérimentations éventuelles dans d’autres régions ;
  • Refuser toute délégation ou transfert de compétence afin de préserver l’égal accès à la culture ;
  • Renforcer les budgets sur la base d’une péréquation nationale par rapport au nombre des habitants et redéployer les subventions vers les zones rurales et périurbaines les plus délaissées ;
  • Conserver une UDAP par département et s’opposer à tout déménagement en cours et à venir qui ne soit pas dans un site patrimonial et ne répond pas aux missions et aux normes des conditions de travail des agents ;
  • La défense du patrimoine et de son Code, régulièrement attaqué notamment dans la recherche en archéologie ;
  • Augmenter les effectifs nécessaires dans tous les secteurs afin de répondre aux missions et à leurs évolutions réglementaires, législatives et numériques ;
  • Replacer au cœur du débat la catégorie C en DRAC par un véritable repyramidage de la filière vers le corps des SA et par un taux de promotion au choix bien supérieur à l’existant pour le changement de corps en B ;
  • Organiser des concours internes et examens professionnels réguliers dans tous les corps pré- sents dans les services déconcentrés afin d’avoir des cadres d’emplois pérennes et statutaires, et en particulier par l’organisation de concours internes et d’examens professionnels dans la filière administrative de B en A pour lutter contre le plafonnement des carrières ;
  • Demander la révision de la cartographie RIFSEEP pour obtenir une égalité de traitement vers le haut ;
  • Revaloriser la carrière des agents par un alignement du régime indemnitaire sur celui des autres administrations régionales (le Ministère de l’Intérieur doit être la référence) ;
  • Sortir de l’opacité quant aux promotions et offrir à tous les agents des DRAC un calendrier de promotion supérieur à l’existant. Valoriser le travail et l’investissement des agents par la promotion ;
  • Accompagner les agents dans toutes les évolutions de leur carrière : formation professionnelle, mobilité, retraite progressive, rapprochement de conjoint, etc. Trop souvent la CGT est obligée de pallier l’absence de réponse de l’administration ;
  • Apporter des mesures correctives pour les agents en situations de discrimination (directes ou indirectes, notamment syndicales et vers les personnes en situation de handicap) ou d’inégalité de traitement avec des mesures concrètes ;
  • Être acteur de la politique de prévention des RPS dans chaque DRAC et DAC ;
  • Donner des moyens matériels décents (fournitures, informatiques, propreté des locaux, EPI…) pour l’accomplissement des missions de service public et la qualité de l’accueil ;
  • Exiger la conception d’outils informatiques qui facilitent la vie professionnelle des agents avec une ergonomie adéquate, en y associant tous les agents de la chaine de travail ;
  • Obtenir le retour des enveloppes de fonctionnement, et notamment les frais de déplacement, en gestion en DRAC. Demander l’imputation des déplacements en transports en commun sur une enveloppe générale, gérée par le secrétariat général ;
  • Se doter de véhicules automobiles adaptés, qui correspondent aux missions des agents sur le terrain et selon les distances à parcourir ;
  • Militer pour que tous les agents des DRAC et DAC aient un accès égal à la médecine du travail, au service d’assistance sociale, à une restauration collective et à un réseau de psychologues du travail sous contrat avec le ministère ;
  • Défendre les métiers de la culture et les statuts qui les fondent. Renforcer les compétences métiers et les coordinations en refusant les polyvalences interdisciplinaires et les grands services uniques qui amenuisent l’expertise, point fort des DRAC. S’opposer à la mutualisation administrative des secrétariats qui vide de sens les missions des agents administratifs ;
  • Rétablir et étendre la maîtrise d’ouvrage État dans le domaine patrimonial, y compris en modifiant la loi ;
  • Redonner un vrai rôle de dialogue social aux instances représentatives du personnel et protéger élus et militants, alerter et enquêter sur la situation des agents en privilégiant les procédures de danger grave et imminent.