Madame la Ministre,
Jeudi 20 mars, plus de 2000 agents du ministère de la culture et de la communication ont pris part, à Paris ainsi que dans de nombreux sites en régions, à la journée d’action contre la Restriction générale des politiques publiques (RGPP) mise actuellement en oeuvre par le gouvernement. Indiscutablement, cette mobilisation, et en particulier notre manifestation du Palais-Royal aux portes de l’hôtel Matignon, figurent parmi les plus importantes qu’a connues notre département ministériel depuis sa création. Tout aussi historique est le nombre de signatures recueillies par la pétition proposée par l’intersyndicale à l’ensemble des personnels du ministère (Non à la RGPP, outil de saccage du service public ! ) qui dépasse à présent 7000, et ne cesse chaque jour de croître.
Un mois auparavant, le 21 février, déjà 800 agents (dont une forte proportion travaille en administration centrale) s’étaient rassemblés sous vos fenêtres pour manifester leur opposition à vos prétendues « réformes » qui, sous couvert de RGPP, et au prix de « restructurations » hâtives, voire absurdes, ne visent qu’à réduire de façon drastique les missions, les effectifs, les services, les moyens de fonctionnement et la capacité d’action de ce ministère. Cette première journée fut également marquée par une grève très massivement suivie, et sans équivalent depuis de très longues années, dans le secteur des musées. Preuve est donc faite, là encore, que les personnels – toutes catégories confondues – rejettent à une écrasante majorité vos orientations, en l’occurrence, ici, le démantèlement programmé de la Direction des musées de France et du réseau des musées nationaux, leur privatisation rampante, comme la remise en cause de leurs missions et de leur statut.
Contrairement à vous, semble-t-il, les agents du ministère de la culture ne pensent pas que celui-ci puisse ne se résumer qu’à un coût qu’il faudrait réduire. Ce n’est pas notre conception de l’action, des responsabilités publiques et de l’intérêt général, dans le domaine de la culture et dans de très nombreux autres encore.
Ensemble, et comme dans beaucoup d’autres ministères, notre détermination à combattre la plus grande offensive jamais menée contre le service public, contre l’emploi public (censée déboucher, dans les 4 prochaines années, sur le plus important plan social qu’ait connu notre pays), contre le statut et les garanties collectives des fonctionnaires et agents publics monte considérablement en puissance, comme le démontrent de manière implacable les faits.
Disant cela, et ainsi que l’ont exprimé les personnels dans l’action les 21 février et 20 mars, nous demeurons résolument favorables à des évolutions porteuses de progrès pour un développement et un élargissement des politiques publiques de la culture – dont évidemment celles mises en oeuvre par le ministère – au bénéfice de toute la population. Celles-ci doivent, d’une part, conduire à enrichir l’offre, les contenus, à soutenir la diversité culturelle, à améliorer encore le service rendu aux citoyens et, d’autre part, être accompagnées des créations d’emplois statutaires nécessaires pour répondre à cette exigence fondamentale.
Force est malheureusement de constater que, sur ces bases, toute discussion avec votre cabinet, comme avec les représentants du Premier ministre que nous avons rencontrés le 20 mars, reste encore aujourd’hui impossible. Sourds à nos protestations, comme à toutes celles qui se multiplient dans le pays contre le désengagement de l’État en matière de politique culturelle, qui connaît une accélération sans précédent, ceux-ci semblent à présent, à la consternation générale, privilégier la voie de l’affrontement.
La volonté de formater le ministère de la culture, ses services et ses établissements aux cadres et dimensions du système libéral a manifestement pris le pas sur l’examen approfondi, voire la maîtrise même, des dossiers. L’influence exercée par les consultants privés dans le cadre de l’élaboration de la RGPP aggrave encore la situation. Le devenir de l’action de l’État est ainsi placé entre les mains d’acteurs dont la connaissance des politiques culturelles, de leur histoire spécifique, de leur diversité et de leur complémentarité, des enjeux particuliers que celles-ci recouvrent, comme de l’activité des services est des plus superficielles, voire inexistante.
Par ailleurs, tous nos interlocuteurs refusent encore et toujours, et ce malgré nos demandes maintes fois réitérées, de produire le moindre début d’argument objectif venant démontrer que l’arsenal des mesures et les « restructurations » que vous vous apprêtez à mettre en oeuvre entraîneraient véritablement une amélioration du service public, comme le prétendent pourtant de concert, en toutes occasions, le Président de la République et le Premier ministre. Faut-il en conclure qu’il ne s’agit là que de purs slogans, voire des contre-vérités ?
Le ministère de la culture, ses personnels, ses usagers comme ses partenaires n’ont assurément pas mérité d’être à ce point méprisés. Votre première responsabilité, les concernant, est de refuser toute régression, non d’en être le promoteur.
Voici les bases sur lesquelles nous vous demandons de recevoir immédiatement nos organisations.
Vous vous devez d’exposer en toute clarté aux agents du ministère et à leurs représentants les objectifs et les ambitions de votre politique culturelle, ainsi que l’ensemble des projets en gestation touchant l’ensemble de nos services et de nos établissements.
A ce titre, nous considérons que votre présence à la réunion du 3 avril concernant les perspectives d’évolution des musées nationaux sous statut de SCN, est absolument incontournable.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, nos respectueuses salutations.
les Secrétaires généraux:
pour la CFDT Culture, Kamal HESNI
pour la CFTC Culture,Chantal THOMAS
pour la CGT Culture, Nicolas MONQUAUT
pour le SNAC FO,Roger MARTINEZ
pour la FSU, Solange LAUZANNE
pour SUD Culture Solidaires,Dominique NOEL
pour l’UNSA Culture,Jean-Luc SARROLA