Depuis la crise sanitaire, le mot à la mode et l’élément de langage récurrent des responsables de notre ministère est : « BIENVEILLANCE ». Selon le Larousse, la définition de la bienveillance est la suivante : « Disposition d’esprit inclinant à la compréhension, à l’indulgence envers autrui. »
Notre administration fait-elle preuve de bienveillance ? Est-ce une méthode à encourager ?
L’Organisation de l’Administration Centrale était censée tendre vers un « management démocratique » (relation d’adulte à adulte), basée sur davantage d’autonomie des agentEs et sur la prise de décision collective, stimulant la motivation de chacunE et instaurant la confiance et la reconnaissance. Modèle qui favorise la « performance » et « l’efficacité », pour reprendre le langage de nos dirigeantEs.
Or la réalité est tout autre, même si certaines entités essaient de s’en approcher (SNUM notamment). Nous continuons de baigner dans un « management autocratique » où les responsables hiérarchiques prennent seulEs leurs décisions, contrôlent de manière intempestive le travail des agents et diffusent au compte-goutte l’information. Et avec une dose de bienveillance, nous arrivons au « management parternaliste », qui infantilise davantage les agentEs en les maintenant dans la même relation parent-enfant que dans le management autocratique, avec de l’enrobage en plus.
La notion de bienveillance induit 2 termes. Compréhension : « Action de comprendre le sens, le fonctionnement, la nature, etc., de quelque chose. », et Indulgence : « Aptitude à excuser, à pardonner les fautes, à ne pas les sanctionner sévèrement. ».
Considérer que les agentEs, en raison de la crise sanitaire et de ses conséquences (protection de sa santé et de celle des autres, éloignement des collectifs de travail), font preuve de manquements qui devraient être excusés, pardonnés ou faiblement sanctionnés, relève bien de l’infantilisation et du manque de confiance.
Être compréhensif tombe en revanche sous le sens, que ce soit dans la situation actuelle ou en « temps normal ». Faire véritablement acte de compréhension devrait conduire, non pas à comme dans le privé, à recruter des « Responsables du Bonheur » (Chief Happiness Officer), car comme dit l’adage, ceux qui en parlent le plus en font le moins, mais au management démocratique : comprendre le sens des missions et le fonctionnement des chaînes opératoires en écoutant les agentEs, leurs propositions, etc.
Concrètement, le principe de compréhension est-il à l’œuvre dans notre ministère ? Non. Et la bienveillance affichée se traduit par de l’arrogance, de l’autoritarisme, du travail empêché, de l’illisibilité, de la surcharge de travail, de la surdité envers les besoins des agentEs et de la réalité du travail. Ainsi que la suppression de postes, le développement de la précarité ou encore la création de plus d’intermédiaires et de circuits d’information et de validation plus longs, peu fluides et plus complexes.
Quelques exemples de soi-disant « bienveillance » :
- BienveillantEs sont nos dirigeantEs lors des réorganisations (OAC, CNAP, Mobilier National, etc.) quand ils et elles refusent de mettre fin à la précarité de certainEs agentEs sous prétexte de l’égalité de traitement ! Et d’égalité il n’y a point quand ils et elles déconcentrent des actes de gestion et créent des inégalités dans la rémunération et l’action sociale entre les agentEs des différents services.
- BienveillantEs sont nos dirigeantEs quand ils et elles refusent de créer des droits collectifs (accompagnement social, télétravail, etc.), substitués par des droits individuels (et donc arbitraires) pour créer de la servitude et de la division.
- BienveillantEs sont les chefFEs de bureau qui imposent à leurs agentEs en télétravail un compte-rendu quotidien de leur activité, en soi-disant « contrepartie » !
- BienveillantEs aussi quand ils et elles se déresponsabilisent face aux problèmes, n’apportent pas de solutions, ne priorisent pas les dossiers à traiter et font de la rétention d’informations.
- Bienveillante est la « dream team » de la Sous-direction des affaires européennes et internationales (SDAEI) quand, après avoir été alertée dès le mois de juillet sur l’urgence de pourvoir les postes vacants pour répondre aux besoins liés à la présidence française de l’UE et à l’urgence d’autres dossiers, elle n’en a pourvu que 2 sur 4 à ce jour.
- Bienveillante est la présidente du CHSCT-AC qui refuse d’inscrire à l’ordre du jour de l’instance les points relatifs à des situations avérées de souffrance au travail et de risques psychosociaux.
- Bienveillante encore est ladite présidente quand, au dernier CHSCT-AC, elle a évoqué à plusieurs reprises la bienveillance de la hiérarchie (télétravail avec garde d’enfants, regroupement des tâches télétravaillables, etc.) tout en doutant de la responsabilité des agentEs: Ils et elles pourraient vaquer à des occupations personnelles s’il leur était octroyé du temps nécessaire pour aller se faire tester en cas de contact à risque…
Des chefFEs bienveillantEs et des personnels fourbes et irresponsables donc, selon la Ministre et son orchestre !
Troquez donc votre bienveillance pour une vraie confiance et donnez aux personnels de l’administration centrale les moyens et les conditions nécessaires pour mener au mieux leurs missions, et reconnaissez leur travail et leur expertise.
Paris, le 28 janvier 2022
https://www.piloter.org/efficacite/critique-management-bienveillance.htm
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- Bienveillance en AC 28 01 22 - 657 Ko