Après les mobilisations du secteur culturel et des agents du ministère, le Ministre s’en mêle… enfin !

L’intersyndicale Culture CGT-FSU-SUD-UNSA a été reçue hier matin pendant plus d’1h30 par le Ministre accompagné de la directrice de cabinet et de la secrétaire générale du ministère. Cette réunion nous a été présentée comme un engagement pris le 20 décembre dernier, mais nous savons que les mobilisations de ces dernières semaines y sont fortement pour quelque chose.

Retraites

Nous n’avons pas manqué de souligner, une fois encore, que le projet de réforme du gouvernement entraînerait à terme une baisse considérable des pensions de retraite des agents fonctionnaires et contractuels et accentuerait gravement le mouvement de paupérisation et de précarisation de notre société. Nous avons évidemment rappelé la détermination des agents, salariés et professionnels de la culture à poursuivre la lutte pour obtenir le retrait de ce projet de régression sociale.

Le Ministre a indiqué défendre au gouvernement les spécificités métiers des intermittents, des artistes-auteurs, des danseurs et musiciens de l’Opéra, des comédiens de la Comédie Française et des journalistes. Mais il n’a pas réagi à nos propos sur les risques de grande paupérisation des personnels du ministère qui pourraient rentrer dans le nouveau régime de retraite à points. Nous avons insisté sur la nécessaire prise en compte de la pénibilité de bon nombre de métiers au ministère (travail de nuit, archéologie, artisans d’art, jardiniers, travail posté et accueil et surveillance, etc.).

Rupture de paiement de personnels précaires

Nous avons ensuite abordé la question du non paiement des salaires de 37 contractuels au musée Guimet et de 165 enseignants des écoles d’architecture. L’intersyndicale a obtenu l’engagement du Ministre de payer immédiatement tous les salaires en retard aux personnels concernés, et d’envoyer fiches de paie et attestations pour Pôle emploi, le tout d’ici le 31 janvier. Il a par ailleurs annoncé que le futur administrateur du musée Guimet arriverait le 5 février.

L’exemple du musée Guimet est révélateur de la situation très détériorée de nombre de nos établissements publics à Paris comme en régions. Après des années de restrictions budgétaires et de coupes claires dans les effectifs, systématiquement dénoncées par nos organisations syndicales, les personnels font à présent les frais au quotidien de dysfonctionnements aussi graves qu’inacceptables. Nous sommes ainsi confrontés à une urgence sociale dont le Ministre doit prendre toute la mesure.

Plan de Transformation Ministériel (PTM)

L’intersyndicale a rappelé son opposition à des restructurations qui affaiblissent le ministère et a témoigné de l’inquiétude et de la colère de agents de voir leurs missions et certains services disparaître des arrêtés et des organigrammes qui circulent. Nous avons souligné que la plupart des pilotes ne respectent absolument pas la méthode de dialogue social préconisées par le Ministre lui-même depuis juin dernier (organisation d’entretiens individuels avant les entretiens collectifs, diffusion d’organigrammes, injonction aux agents de faire un choix, etc.).

En outre, nous avons déploré l’absence du cabinet du Ministre lors des réunions mensuelles PTM, alors que les sujets abordés sont éminemment politiques et nécessitent des arbitrages qui lui incombent. Il a été fortement surpris d’apprendre qu’en effet son cabinet n’était jamais représenté…

Le Ministre s’est engagé à revoir l’intersyndicale dans 15 jours. Il a donné instruction à son cabinet de recevoir les organisations syndicales avant que les premiers arbitrages sur la future organisation du ministère soient rendus.

Il a dit avoir parfaitement compris que la situation était excessivement tendue sous l’effet de la juxtaposition de réformes (PTM, Déconcentration, Loi de transformation de la Fonction publique) ayant toutes des conséquences importantes sur les missions, le travail, son organisation, la situation des agents et leur carrière, voire sur leur état de santé (tant au niveau de l’administration centrale qu’au niveau régional).

Il a confirmé son projet de centraliser un maximum de fonctions dites support au secrétariat général et de créer une nouvelle direction porteuse de politiques culturelles ambitieuses et renouvelant notre approche de la démocratisation culturelle.

Nous l’avons alerté sur le projet de centraliser la fonction Formation qui constitue en fait une attaque inédite contre les politiques de formation du ministère conduisant de façon certaine à leur affaiblissement.  Il a semblé nous entendre sur la nécessité de continuer les concertations qui seraient déjà abouties d’après certains pilotes (comme pour l’international) ou non (meilleure articulation autour des Drac, place et rôle de la tutelle).

Nous avons souligné que ses arguments sur l’efficacité d’une centralisation forte au secrétariat général entrent en totale contradiction, par exemple, avec la déconcentration d’actes de gestion des fonctionnaires aux établissements publics – mesure qu’il défend mordicus.

Déconcentration

Sur la question également très sensible de la déconcentration en DRAC de mesures, dispositifs et labels jusqu’à présent portés par l’administration centrale, nous avons réaffirmé les liens intrinsèques entre l’administration centrale et les DRAC, la nécessité de ne pas affaiblir notre action en détruisant des processus de travail fragiles et des échanges permanents et précieux. La déconcentration telle qu’elle est conduite aujourd’hui porte atteinte en effet et à l’administration centrale et aux DRAC.

Dysfonctionnement des Ressources Humaines (RH) et communication défaillante

Le Ministre, qui a reconnu qu’un accompagnement social au plus près de la réalité des agents s’imposait, a convenu qu’une réforme de fond des RH était urgente, en demandant à la secrétaire générale de s’en charger, avec la possibilité de s’adjoindre des compétences extérieures si besoin.

Le climat social, l’ambiance générale et le ressenti parfois très douloureux des collègues trouvent aussi leur origine dans des méthodes de fonctionnement et une communication interne particulièrement défaillantes. Ainsi nous avons rappelé « les incidents » et loupés récents :

  • Publication au J.O à la date du 18/01 de l’arrêté d’organisation du ministère de la Culture abrogeant celui de 2009 sans le moindre souci d’information, d’explication et de pédagogie ni du secrétariat général ni des directions générales, 

  • Diffusion très insuffisante de la circulaire du secrétariat général relative à la déconcentration en date du 27/12 et de ses notices d’explication tant en administration centrale qu’en services déconcentrés (absence de doctrine sur les signatures entre DRAC et préfets, absence de directive nationale d’orientation notamment, aucune prise en considération du travail de concertation sur les chantier déconcentration avec les représentants du personnel),

  • Envoi d’un courriel d’information sur le lancement de la campagne annuelle d’entretiens professionnels sans qu’aucune instruction n’ait été donnée à la hiérarchie directe s’agissant des projections et objectifs 2020 (N+1) alors même que les personnels sont dans l’attente des futurs arbitrages PTM. 

Emplois et carrières

Nous avons rappelé au Ministre que la secrétaire générale s’était engagée oralement, lors de la réunion de négociation du dernier préavis de grève, sur :

  • L’ouverture de concours et l’amélioration des carrières pour les titulaires,

  • Un nouvel accord sur le retour à la règle et la revalorisation de la grille des salaires des contractuels.

Nous avons insisté sur l’urgence de faire un nouveau plan de résorption de la précarité (CDIsation et plan de titularisation) et sur le risque d’avoir recours au contrat de projet. Nous avons demandé au Ministre qu’il prenne une décision pour éviter son développement au ministère de la Culture. 

Enfin, nous avons demandé l’ouverture d’un protocole d’accord sur l’action sociale (accès aux prestations interministérielles, restauration collective, logements, vacances) et l’ouverture de négociations sur la protection sociale complémentaire.

En résumé, le Ministre s’est engagé sur 3 points en particulier :

  • Mettre en place un véritable pilotage du cabinet sur le PTM (avec la présence d’au moins un membre du cabinet lors des journées de travail mensuelles PTM, notamment en cas d’arbitrages nécessaires),

  • Travailler sur un réel accompagnement social des agents dans cette période particulièrement anxiogène, ainsi que sur la réorganisation du Service des Ressources Humaines (avec moyens supplémentaires),

  • Mettre en place très vite un véritable dispositif de communication interne sur le PTM, et à moyen terme sur la communication interne et sociale (avec moyens supplémentaires et possible changement d’organisation).

Un futur calendrier sera proposé sans attendre aux organisations syndicales et aux agents.

Les organisations syndicales sont invitées à envoyer par écrit à la secrétaire générale et à la directrice de cabinet leurs propositions ou oppositions relatives aux chantiers qui n’ont pas fait l’objet de concertation, les chantiers dont les concertations n’ont pas été achevées, les engagements non tenus à ce jour, les points de vigilance, etc.  L’intersyndicale vous invite donc à participer massivement aux assemblées générales pour échanger sur ces sujets.

D’ici le début de la semaine prochaine, le cabinet répondra par ailleurs aux questions diverses posées par les organisations syndicales aux comités techniques ministériels de novembre et décembre.

Il ne fait aucun doute que la mobilisation remarquable, remarquée et durable des personnels du ministère de la Culture commence à peser très fortement et fait bouger les lignes.

L’intersyndicale du ministère appelle les agents à renforcer encore leurs solidarités et à faire entendre leur voix ensemble, dans l’unité.

Ce combat, c’est le nôtre à toutes et tous depuis des années : pour un ministère de la Culture rassemblé, renouvelé, plus fort, au service de toute la population.

Paris, le 23 janvier 2020