De passage à Cannes le week-end dernier, le Premier ministre n’aura pas fait le voyage pour rien : « Cela a été une erreur au cours des deux premières années du quinquennat de François Hollande de baisser le budget de la Culture ». Cette « petite phrase » de Manuel Valls a atteint son objectif puisqu’elle a fait le buzz. C’est aussi une façon toute amicale de cibler son prédécesseur, Jean-Marc Ayrault, et d’égratigner gentiment le Président de la République.
Avec le festival, Manuel Valls a trouvé une caisse de résonance idéale pour exprimer ses regrets et rappeler son attachement à la culture : « une priorité ». Il s’est aussi une nouvelle fois positionné parmi ceux qui y pensent le matin en se rasant.
Mais qu’en est-il vraiment de la politique du gouvernement en matière de culture une fois retombée l’agitation momentanée du microcosme politico-médiatique.
Le Premier ministre et son gouvernement reviendront-ils sur les coupes budgétaires infligées au ministère de la culture en 2013 et 2014 (près de 7% de baisse) ? Reviendront-ils sur les milliers de suppressions d’emplois qui handicapent lourdement les politiques culturelles et qui étranglent tant le patrimoine et la recherche, que la création ou encore les enseignements artistiques et culturels ? Jusqu’à nouvel ordre et sauf coup de théâtre, la réponse est NON !
Manuel Valls qui, sous les feux de la rampe, se pose facilement en héraut de la culture, a aussi affirmé lundi 18 mai à l’antenne de France Culture que les collectivités locales « ne sont pas obligées de saccager leur budget de la Culture ». On le savait déjà mais nous en avons la confirmation : monsieur Valls ne manque pas de culot. N’était-il pas déjà le Premier ministre de François Hollande quand à l’été 2014, ils ont décidé d’un commun accord d’imposer 50 milliards d’euros d’économies sur les dépenses publiques pour les exercices 2015, 2016 et 2017 ; dont 18 milliards pour l’Etat ; et 11 milliards pour les Collectivités territoriales (le reste pour la protection sociale). Manuel Valls est probablement un habile politicien mais, las, les faits sont têtus.
Pour le ministère de la culture et ses agents, les effets de manche du Premier ministre ne suffisent pas à repeindre la réalité. Notre ministère est un ministère délaissé, un ministère pauvre où les carrières sont sinistrées et où les emplois manquent cruellement à des missions maltraitées et qui sont la cible, une fois encore, d’une réforme arbitraire, brutale et destructrice : la « réforme » territoriale. Le ministère de la culture est miné par la précarité. Il a été délibérément affaibli avant 2012 comme après.
En dépit des efforts acharnés des organisations syndicales, la situation sociale du ministère de la culture demeure extrêmement préoccupante.
Tout cela, ce n’est pas du cinéma. C’est la dure réalité des personnels au quotidien à Paris comme en régions. Ce sont aussi autant de revendications incontournables et urgentes portées par les représentants syndicaux que Manuel Valls et Fleur Pellerin vont devoir entendre, et vite !
Paris, le 19 mai 2015