CNESERAC – On cherche encore !

18 décembre 2025 - par CGT-Culture

Déclaration liminaire des élue.es CGT-Culture au CNESERAC du 18 décembre 2025

Pour la dernière séance plénière du CNESERAC de l’année, et la première dans le giron de la Direction Générale de la démocratie culturelle, des enseignements et de la recherche (DGDCER), la CGT Culture souhaite exprimer ses craintes sur l’avenir de la recherche au sein du ministère de la Culture. Certes, le Ministère a renouvelé une Stratégie nationale de recherche sur la période 2023-2027 pour « favoriser l’intégration de la recherche dans les établissements relevant de sa tutelle », pour « articuler l’enseignement, la recherche et les métiers ». Mais où sont les efforts et les moyens pour porter ces ambitions ?

Les annonces budgétaires sont inquiétantes. Pour n’en citer qu’une, notons l’exploit de réduire de 73 millions d’euros le programme 361« transmission des savoirs » l’année même de la création d’une DGDCER qui se donne l’ambition d’articuler démocratie culturelle, enseignement et recherche. On va probablement tenter de nous rassurer en affirmant que l’enseignement supérieur et la recherche culture (ESRC) ne sont pas visés. Mais la CGT-Culture rappelle que s’il n’y a pas de transmission des savoirs sans production des savoirs et des connaissances, sans recherche et sans création, il n’y a pas non plus de recherche sans formation à la recherche et par la recherche, sans transmission des savoirs. 

L’instance qui nous réunit aujourd’hui traduit quant à elle les difficultés à engager les ambitions de la recherche. Le CNESERAC a été mis en place pour être moteur dans la cohérence entre formation et recherche et pour assurer une meilleure structuration de la recherche. Depuis notre mandat de décembre 2023, la commission d’étude spécialisée du CNESERAC consacrée à la recherche (CES Recherche) s’est réunie le 16 mai 2024 pendant deux heures et deux fois en février et mars 2025 car l’ensemble des points sur les perspectives 2025 de la Stratégie Recherche n’avaient pu être abordés dans les deux heures initialement dévolues ! Depuis, aucune réunion ne s’est tenue, aucun des points soulevés par les participants n’a été travaillé… À quoi servons-nous si notre expertise n’est pas prise en compte ?

Le plan d’action de la Stratégie ministérielle de la Recherche 2023/2027 prévoyait une évaluation à mi-parcours (fin 2025), à savoir aujourd’hui. Où en est-on sur les mesures transversales et prioritaires ?

Sur la mesure 1 « L’accompagnement des acteurs de la recherche » :

  • L’injonction à la recherche de financement propres par appel à projet complexifie le travail des chercheurs, le précarise, et réduit d’autant le temps dévolu à la recherche.
  • Le désengagement ministériel (en temps et en budget) sur les programmes incitatifs de recherche au profit des appels à projet externes et chronophages (ANR, Projets européens…) se fait au détriment des petites unités de recherche en bridant leurs capacités de recherche.
  • L’accès aux ressources documentaires, aux bases de données et aux portails de publication en sciences humaines et sociales n’est toujours pas porté par la tutelle au sein des établissements et repose sur les accords locaux avec les universités, ce qui accroît les inégalités de travail entre chercheurs.
  • Le retrait du CNRS annoncé ou effectif de plusieurs laboratoires de recherche a des impacts dramatiques sur les équipes, les budgets et les ressources, tel que nous l’avions synthétisé à l’issue de la dernière plénière et sur lequel nous n’avons toujours aucun retour de la tutelle.
  • Des difficultés à pérenniser ou à renouveler des partenariats entre établissements culture et universités mettent en difficulté des laboratoires et leurs chercheurs, notamment dans leur capacité à porter la formation à et par la recherche, et plus particulièrement le doctorat.

Sur la mesure 2 « Le renforcement du financement des jeunes chercheurs » :

  • Si la revalorisation des contrats doctoraux a été obtenue pour les ENSA, les heures d’enseignement prévues dans les contrats doctoraux ne sont toujours pas alignées sur celles des contrats doctoraux du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Espace (MESRE).
  • Le financement public des thèses par des contrats doctoraux est toujours en deçà des besoins et toutes les composantes de l’ESR Culture n’ont toujours pas de contrats doctoraux ministériels.
  • La suite de carrière des jeunes docteurs est précaire sans perspectives de statuts similaires à ceux des Attachés temporaires d’enseignement et de recherche (ATER) au sein du ministère de la Culture.

Sur la mesure 3 « Le renforcement de la filière scientifique et de recherche du ministère de la Culture » :

  • Ici, le recul est de taille : la disparition des corps de techniciens de recherche et de secrétaires de documentation est actée, avec pour seule perspective le recours à la contractualisation des missions occupées ou leur prise en charge par des stagiaires, doctorants ou autres petites mains
  • Les moyens pour déployer les carrières recherche des enseignants sont toujours insuffisants, que ce soit en matière de transferts de charge pour recherche, de congés pour études et recherche, de délégations CNRS…
  • Le statut des enseignants des ENSARTS, inchangé depuis 2002, n’est toujours pas en adéquation avec leurs missions. Pire, l’arrêt des concours depuis 2018 et l’extinction programmée du corps des titulaires (PEN) de ces écoles au profit de contractuels sous-payés, ne pourra qu’entraîner une dégradation des conditions du travail et de la recherche. Comment ne pas y voir, à terme, une mise à mort des écoles d’art elles-mêmes, devenues incapables d’attirer des professionnels talentueux ?

C’est pourquoi plusieurs points auraient mérité d’être à l’ordre du jour et doivent être immédiatement inscrites au programme des travaux des travaux du CNESERAC :

  • l’évaluation à mi-parcours de la feuille de route sur la Stratégie ministérielle de Recherche ;
  • le bilan de l’accord-cadre 2021-2025 MC/CNRS, en prévision du nouvel accord cadre ;
  • des réponses aux demandes réitérées en CES Recherche et en plénière de moyens pour accompagner la recherche au sein des établissements et doter les personnels qui en manquent encore d’un statut d’enseignants chercheurs.

Le Ministère, telle la société, souffre-t-il d’un déficit de reconnaissance de la science en tant que travail ? Ignore-t-il que les activités de la recherche et sa valorisation mobilisent des acteurs différents – techniciens, ingénieurs, chercheurs, doctorants, documentalistes, archivistes… – et des compétences diverses ? Ignore-t-il la précarisation de la recherche actuelle, les effectifs insuffisants et les recrutements difficiles dans les filières recherche et documentation, métiers peu valorisés et méconnus au sein de son administration ? Ignore-t-il la responsabilité qu’il porte pour garantir un cadre de production de la recherche publique nécessaire à l’indépendance de la recherche et des chercheurs ? Dans le contexte international contemporain, l’enjeu est plus que jamais d’actualité.