Ce CTP initialement prévu le 19 octobre et que nous avions décidé de boycotter pour des raisons de pseudo-concertation et de précipitation à faire passer une réforme dont le CMN n’est à l’heure actuelle pas en mesure d’assurer. Mais l’important étant de faire passer à tout prix certaines mesures avant les échéances électorales…
Nous vous faisons tout d’abord part de la déclaration liminaire avant d’aborder le texte du projet de modification du décret du statut du Centre des Monuments Nationaux :
«Comment comprendre ce décret modificatif autrement que comme une volonté précipitée à démanteler des services entiers de l’Etat au détriment de la conservation et de la restauration du patrimoine. La mise en cohérence de ces services, le gain en efficacité avaient-ils nécessairement à passer par cette confusion des genres présentée comme la panacée en matière de gestion patrimoniale.
Le décret modifiant le statut du Centre est loin de garantir le financement, les moyens humains et les compétence pour ces missions nouvelles relative à l’entretien, la conservation, la restauration dans un périmètre de monuments non encore déterminé. Il intervient dans un contexte de décentralisation ainsi que de déconcentration et réorganisation de l’établissement peu propice à entamer dans des conditions sereines une transformation aussi profonde que celle proposée par le décret.
Voilà aujourd’hui près d’un siècle que la CNMHS puis le CMN ouvrent et présentent le patrimoine national aux publics. Il reste encore un long chemin à parcourir pour «démocratiser» notre culture patrimoniale tout en pointant ce qui selon nous est responsable en grande partie de la situation actuelle de marchandisation du patrimoine.
Hormis les travaux pour les structures d’accueil des publics, le CMN n’a aucune expérience de la maîtrise d’ouvrage pour les monuments nationaux.
L’expérience montre par ailleurs des divergences notables de point de vue entre ceux qui sont aujourd’hui les conservateurs des monuments et la logique d’exploitation du CMN.
Présentée comme une volonté de dynamiser la gestion du patrimoine national et de gain d’efficacité, le regroupement au sein du CMN des compétences d’exploitant et de conservateur font dangereusement du Centre un établissement «juge et partie» en matière de gestion patrimoniale. Là où précautionneusement la séparation de ces compétences a été le garde-fou et la garantie d’un équilibre entre l’ouverture au public des monuments et leur conservation, le mélange des genres nous interpelle.
D’autres expériences de ce genre montrent quels en sont les écueils. A titre d’exemple, présentée parfois comme ayant été la meilleure idée des Etats-Unis (Voir National Geographic d’octobre 2006), les Parcs Nationaux font là-bas les frais de ce même regroupement de compétences. Victimes de leur succès, autrement dit de leur sur-fréquentation, l’exploitation de ces sites naturels se fait en effet au préjudice de leur bonne conservation.
Comment faire confiance en effet à une seule et une même institution pour ne pas céder, dans un contexte de surcroît d’exploitation marchande, à minimiser l’impact sur l’intégralité d’un patrimoine de mesures liées à favoriser la fréquentation des sites.
Le CMN a du œuvrer pour de simples travaux d’aménagement sous la vigilance d’ABF et d’ACMH exprimant un point de vue parfois en complète opposition avec celui du Centre. Comment imaginer demain , malgré la précision faite dans le projet de nouveau statut, d’un développement de la fréquentation des monuments dans la limite de sa compatibilité avec leur bonne conservation, que le CMN aura toutes les cartes pour juger à lui seul de ces limites.
Au-delà des inquiétudes que suscite la cohabitation dans ce même établissement de missions et compétences ne participant pas forcément des mêmes logiques et enjeux, la CGT s’interroge également sur le déplacement du centre de gravitation de l’établissement au regard de l’élargissement de ses missions à la maîtrise d’ouvrage. En effet, en déficit de dynamique pour mener une réelle politique culturelle dans les monuments, les responsablilités nouvelles qui attendent le Centre risque de l’accaparer longtemps au détriment de ses missions historiques.
Pour toutes ces raisons, nous dénonçons l’idéologie qui motive un transfert de compétences dont le seul but est de démanteler des services de l’Etat ainsi qu’une précipitation évacuant toute idée de débats sur ces sujets aussi importants que sont la politique culturelle et la conservation du patrimoine national.»
Ce que l’on peut retenir des modifications
1- Les missions s’élargissent
Le Centre des Monuments Nationaux a pour vocation la présentation des monuments et de leurs collections et d’en développer la fréquentation. A partir du 1er janvier 2007, le CMN deviendra églament maître d’ouvrage, c’est-à-dire responsable de l’entretien, de la conservation et de la restauration des monuments dont il a la gestion, mais également de monuments historiques état.
A l’heure actuelle, nous ne connaissons pas le périmètre sur lequel interviendra le CMN en maîtrise d’ouvrage. Nous ne connaissons pas non plus l’organisation des cellules maîtrise d’ouvrage (effectif…). Sur la taxe de 70 millions affectée au CMN, 50% seront à destination des monuments CMN et 50% aux monuments état, mais nous ne savons pas si cette somme est suffisante aux travaux. Mais ce que nous savons c’est que le CMN n’en sait probablement pas plus que nous !
2- Le Centre des Monuments Nationaux reste EPA
Si l’on pourrait considérer comme une bonne nouvelle que le statut du CMN reste un établissement public à caractère administratif, ne nous y trompons pas, c’est peut-être reculer pour mieux sauter. En effet, au 1er janvier 2007, le CMN bénéficiera d’une taxe (sur les mutations) à une hauteur plafond de 70 millions annuels (140 pour 2007 car effet rétroactif sur l’année 2006) : étape 1. Si durant l’année 2007, le CMN va travailler en étroite collaboration avec notamment les DRAC qui ont les compétences, en 2008 les personnels des DRAC devraient intégrer le CMN, il deviendra alors pleinement LE prestataire de maîtrise d’ouvrage : étape 2. Ne reste alors plus qu’à franchir la troisième étape pour devenir EPIC : une gestion comptable et des ressources humaines en droit privé.
Cela pourrait arriver aussi vite que ce décret qui a pris un véritable coup d’accélérateur depuis cet été et plus précisément depuis les journées du patrimoine avec l’intervention du Premier Ministre, Dominique Galouzeau de Villepin, à Amiens. Comme quoi, quand il y a une véritable volonté, les réformes vont très vite…ce n’est pas comme la réforme concernant le statut des personnels contractuels !
3- Les adminstrateurs «disparaissent»
Seul échelon déconcentré existant à l’heure actuelle que l’on fait aujourd’hui disparaître. Alors que la réflexion concernant la réorganisation de l’établissement n’est pas aboutie, on supprime purement et simplement tout type d’organisation quitte à ce qu’à terme cela se termine par une balkanisation des régions ou une organisation de baronnies locales.
4- Le président devient omnipotent
Le président se voit attribuer de nouvelles responsabilités qu’il n’avait pas avant et qui passaient par le conseil d’administration ou par le comité technique paritaire :
il définit l’organisation des services (CTP) ;
il arrête la programmation des travaux dans les monuments nationaux ;
il fixe le prix des droits d’entrée, des prestations et services rendus, des redevances d’occupation dans les monuments nationaux…(CA)
Bref, tant que nous aurons à la tête de l’établissement un président responsable, «tout ira bien dans le meilleur du monde» dans le cas contraire toutes les dérives seront permises…