Intervention liminaire de la CGT-Culture au CTAC Action Publique 2022 du 16 novembre 2017.
Ce comité technique est consacré exclusivement au programme « Action Publique 2022 », qui n’est rien d’autre qu’une nouvelle étape de la réforme de l’Etat, et que la CGT-Culture n’a pas hésité à qualifier lors du comité technique ministériel du 3 octobre dernier de « RGPP XXL ».
Bien que vous mettiez régulièrement en avant l’importance du dialogue social, vous n’avez pas pris l’initiative de ce comité technique. Il aura fallu en effet que les organisations syndicales prennent les devants et que les représentants des personnels demandent ensemble la convocation de cette instance sur cet ordre du jour-là – et le sujet est grave – pour qu’enfin nous puissions espérer obtenir des informations de votre part et, si possible, avoir un débat.
Lorsque la CGT, au dernier comité technique ministériel, a lancé une alerte politique et sociale sur la nocivité de cette nouvelle réforme voulue par l’Élysée et pilotée par le Premier ministre, vous avez tenté de nous enfermer, une fois n’est pas coutume, dans la posture du vilain syndicat qui agite des chiffons rouges en toutes circonstances.
Mais en vérité, nous avions vu juste. Nous étions dans le vrai et peut-être même en deçà de la réalité.
Vous venez devant nous aujourd’hui, un peu contraints et forcés, avec une espèce de document méthodologique qui ne contient aucune des informations que les agents attendent. Rien qui ne puisse éclairer, en toute transparence et loyauté, le débat que tout le monde est en droit d’exiger sur le devenir de notre ministère, et tout particulièrement de son administration centrale.
Ironie de l’histoire, nous disposons toutes et tous désormais du plan de bataille que vous avez préparé à l’attention du gouvernement puisqu’il est en ligne, repris et publié par la presse. Ce document interdit, et qui conduirait donc la ministre de la Culture -et de la Communication- à engager une action en justice au risque de donner un coup de canif au respect du secret des sources et pour finir à la liberté de la presse, est connu de tous.
On ne peut donc pas faire comme s’il n’existait pas, convenez-en.
Mais ce que nous sommes venus chercher ici ce 16 novembre, nous les représentants des personnels, ce n’est pas une polémique sur la forme même s’il y aurait largement matière à cela.
Nous voulons savoir où le coup va porter concrètement en termes d’organisation structurelle de l’administration ; quels seront les directions, les services, les départements, les bureaux impactés. Nous voulons savoir quelles seront les missions touchées, quelles filières, quels métiers, quels emplois et combien.
L’organigramme actuel du ministère de la culture résulte de la RGPP. Cette réforme conduite dans les conditions que l’on sait par Nicolas Sarkozy et François Fillon, nous l’avons farouchement combattue. Il ne sera donc pas dit que nous nous arc-boutons sur l’existant même si nous vivons, tant bien que mal, avec ce schéma organisationnel depuis maintenant huit ans.
S’il s’agissait de réfléchir à l’organisation du ministère de la culture qui est donc loin d’être optimum, qui est même souvent défaillante tandis que le travail des professionnels de la culture que nous sommes est abîmé ; s’il s’agissait de parler, enfin, des barrières à faire tomber pour travailler ensemble ; de reconnaître et valoriser le travail de chacune et chacun ; s’il s’agissait enfin de faire un ministère ensemble pour assurer un meilleur service public, alors, oui, nous serions partants pour avoir cette discussion.
Mais ce n’est pas ce que vous voulez faire. Au nom du gouvernement, vous vous placez une nouvelle fois sous le dogme de la réduction des dépenses publiques, du toujours moins d’État, sous le dogme des économies d’échelle et des destructions d’emplois publics. Et tout cela pourquoi, pour des économies infinitésimales au regard de la part toujours aussi faible du budget du ministère de la Culture dans le budget de l’État : moins de 1% !
Tout cela porte un nom : c’est le détricotage du ministère de la Culture et à terme, sa casse. Alors même que la culture doit plus que jamais être une priorité pour la société, alors même que la culture et donc notre société ont besoin d’un ministère de la Culture fort et moderne, nous ne pouvons pas laisser faire.
Cette réforme brutale et destructrice nous allons la combattre dans l’unité syndicale, en rassemblant les agents sans aucune exclusive, et nous allons la faire reculer car nous n’avons guère d’autre choix que de défendre bec et ongles ce service public essentiel et qui n’a pas mérité un tel acharnement ».
Compte-rendu du CTAC Action Publique 2022 du 16 novembre 2017
À tomber du camion on risque de se faire très mal !
Le CTAC qui s’est tenu le 16 novembre sur le programme Action Publique 2022 (AP 2022) l’a été à la demande des syndicats, qui n’ont pas opté pour la chaise vide malgré ce jour de grève.
Cette « RGPP XXL » dont le contenu, limpide, a été dévoilé par voie de presse depuis le 10 novembre dernier, illustre malheureusement la politique du gouvernement de vouloir réduire drastiquement et sans délai la Fonction publique et les services publics.
Ironie de l’histoire, la Ministre, plutôt que d’assumer la teneur et la portée d’un document qui, quoi qu’elle puisse en dire, émane bel et bien de son entourage, a opté pour la menace et la sanction en annonçant vouloir porter plainte contre X. Au vrai, personne ne peut réellement en vouloir à cette source ayant décidé d’alerter l’opinion publique et le monde de la culture sur le contenu dangereux de cette contribution ministérielle, bien au contraire !
L’administration, par la voix du Secrétaire général Hervé Barbaret, a répété que cette fameuse contribution n’est qu’un document de travail soi-disant « inachevé », « incomplet », « non validé », tout en ajoutant qu’il est « insatisfaisant » et en particulier sur la forme…
Pour sûr ! Manque l’enrobage des éléments de langage pour nous faire passer la pilule -basée sur de faux constats et des copiés-collés grossiers des préconisations non retenues pour la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) et la MAP (Modernisation de l’Action Publique), mais nous sommes loin d’être dupes.
Nous avons dénoncé le paradigme qui préside à cette contribution, celui de la réduction, de la suppression et de l’abandon. La succession et l’accumulation de réformes reposent toujours sur le même postulat : comment réduire les coûts. Car les agents et leurs missions continuent de n’être appréhendés que de manière comptable et financière ! En aucun cas ne sont évoqués leur expertise, le sens de leur travail et leurs conditions de leur travail.
Mais quand nous avons interpellé le Secrétaire général sur les futures suppressions d’emploi prévues en 2018, soit 60 en administration centrale et 10 en services à compétence nationale, aucune précision ne nous a été apportée (et ce sans considérer les suppressions mentionnées dans la contribution ministérielle durant les 5 prochaines années).
Le document officiel envoyé par l’administration 2 jours avant la tenue du CTAC, qui n’est en réalité qu’une note nous (re)présentant la méthodologie et le calendrier du programme Action Publique 2022 -avec une pseudo déclinaison au niveau de notre ministère- expose le processus de la réforme qui s’appuie sur 3 « chantiers » conduits en parallèle :
- Le Chantier Comité d’Action Public 2022 (CAP 2022), composé, selon le SG, de personnes représentant la société civile ( ! voir l’article de Mediapart du 26/10/18, Le gouvernement privatise le futur des services publics, qui présente les membres de la commission « dominée par des représentants du privé », notamment issus des secteurs de la banque et des fonds d’investissement ainsi que de l’immobilier). Ce fameux comité doit « auditionner » la Ministre, son cabinet ou les directeurs courant novembre/décembre afin de rendre des propositions globales et définitives en janvier/février 2018. « Non non non, la contribution tombée du camion n’était certainement pas la version censée être envoyée au Comité » (prenez-nous pour des idiots…)
- Le Forum de l’Action Publique qui consiste à « recueillir les attentes et propositions des citoyens » (de novembre à janvier 2018) et à « réfléchir avec les agents publics à un cadre de travail modernisé » (jusqu’à février 2018), c’est-à-dire à saupoudrer la démarche d’une prétendument démocratie participative
- Les Chantiers transversaux dont le but est d’« identifier des leviers de transformation dans les ministères » et dont la contribution ministérielle est à finaliser en… décembre 2017 ( !)
Après de nombreuses alertes sur l’absence de dialogue social, un calendrier bien trop serré qui reflète la volonté gouvernementale d’aller très vite car, comme l’indique la contribution « erronée » du ministère, les « conditions de succès » de réorganisation et de coupe dans les effectifs reposent sur une « annonce rapide de la stratégie de transformation », nous avons obtenu des éclaircissements et confirmations sur le déroulé et la méthode :
La Ministre présentera au CTM du 4 décembre prochain sa « véritable » contribution sur AP 2022, qu’elle aura donc transmise au Comité. Néanmoins, cette position ne serait pas arrêtée, selon le Secrétaire général qui s’est engagé à plusieurs reprises sur cette affirmation et donc tout à fait formellement devant l’instance élue par les personnels. Les éléments avancés par la Ministre serviraient donc de base de discussions avec les organisations syndicales, un round de dialogues étant prévu jusqu’au premier trimestre 2018 pour aboutir à « une position commune et des propositions ». Ces discussions organisées avec les OS seraient thématiques et déclinées, au besoin, direction par direction.
Non, nous ne sommes vraiment pas dupes. L’introduction du dialogue social dans ces « chantiers » n’était initialement pas prévue, comme le prouve la contribution ministérielle qui a fuité.
La CGT-Culture participera néanmoins aux réunions avec toute l’exigence de ses propositions et sa détermination à sauvegarder les emplois et les missions fondamentales du ministère de la Culture. Dans ce but et face au rouleau compresseur du gouvernement à l’œuvre dans ce projet Action Publique 2022, la mobilisation des personnels reste absolument nécessaire et nous allons nous y employer dès à présent.