Déclaration de la CGT-Culture en comité technique ministériel du 4 juillet 2018

Madame la ministre,

Notre intervention sera claire, directe, sans arrière-pensée. Elle appelle des réponses tout aussi claires, directes et sans arrière-pensée.

Cela ne vous étonnera pas, nous donnerons la priorité aux questions prioritaires et essentielles à l’avenir du ministère que nous souhaitions voir inscrites à l’ordre du jour de cette séance.

Là encore, la demande que nous vous avons adressée le 29 juin était on ne peut plus claire : c’est à vous, madame la ministre, d’apporter les réponses concrètes que les agents attendent et que vous leur devez. C’est urgent !

Ces questions qui sont désormais sur toutes les lèvres, je les rappelle ici au nom de la Cgt :

– quid de la négociation annoncée concernant les Drac(s) suite au rapport d’inspection,

– quid des vacances de postes de direction de la DGP, de la DGCA, du SIAF, du SMF et de la RMN,

– quid du projet de transfert de gestion des agents du ministère aux établissements publics,

– quid du chantier nommé « Administration centrale stratège », de son calendrier et des modalités de concertation avec les représentants des personnels ?

DRAC

Vous avez bien voulu ouvrir une négociation sur les priorités à donner aux Drac car vous êtes intimement convaincue de leur nécessité pour la mise en œuvre des politiques publiques culturelles nationales.

Mais comme vous le savez, nous sommes toujours dans l’attente des arbitrages interministériels ou autrement dit des arbitrages du Premier ministre et du Président de la République quant à l’organisation territoriale de l’Etat. Ce que nous avions déjà pointé avec insistance lors de la présentation du rapport des trois inspections le 20 avril dernier.

Alors dites-nous quelles sont les intentions du gouvernement dans ce domaine : abandon, transfert, délégations de compétences, pour reprendre très précisément les mots martelés par le Premier ministre depuis septembre dernier ?

Et combien de suppressions d’emplois alors que le rapport d’inspections des DRAC préconise d’arrêter toute suppression d’emplois ?

Vacances de postes de direction de la DGP, de la DGCA, du SIAF, du SMF et de la RMN.

Les vacances de postes de direction se multiplient au ministère. Si le SRH a retrouvé une cheffe de service depuis notre dernière communication sur le sujet, il ne fait plus mystère pour personne que les postes de DGCA et DGP sont vacants, celui de la présidence de la RMN aussi, et toujours les postes de directeur du SMF et de directeur du SIAF.

Là vous aurez du mal à nous faire croire que la situation est normale.

Et vous aurez du mal à nous faire croire et que cette situation inédite et particulièrement anxiogène pour les agents ne cache pas des projets malfaisants et nocifs pour le devenir de l’administration centrale et les missions du ministère.

Quand ces postes essentiels à la bonne marche du ministère vont-ils être pourvus ?

Chacun le sait, chacun le voit : ce trou d’air dans la gouvernance de votre ministère fragilise considérablement les directions et leur capacité à agir.

Des lettres de mission qui peuvent en cacher une autre, la preuve

Pire s’ajoute à cela une multiplication de lettres de mission qui viennent de tout en haut, du château : la dernière en date étant celle confiée au président du conseil d’administration de la Villa Médicis, Thierry Tuot, chargé de proposer des réformes d’ici à la rentrée dans le domaine des résidences d’artistes.

Nous nous attendions à ce que Stéphane Bern – ou d’autres – se voit confier dans la moiteur de l’été une nouvelle mission par le Président de la République pour aller encore plus loin et renverser la table en matière de patrimoine et d’organisation administrative de la chaîne et des réseaux patrimoniaux…

Mais il n’aura pas fallu attendre plus longtemps. Fort heureusement, la presse et les journalistes, dont on ne dira jamais assez qu’ils sont essentiels à la vie démocratique de notre pays et dont nous défendons farouchement l’indépendance et la liberté font leur travail et ils le font bien.

La mission Bélaval, un coup de poignard dans le dos du ministère, de la DGPat et des agents

Ainsi, alors qu’avec votre cabinet vous appliquez sans vergogne la loi du silence, un article publié dans La Lettre de L’Expansion le 2 juillet révèle qu’Emmanuel Macron en personne vient de missionner monsieur Philippe Bélaval pour mener à bien une réflexion sur la politique publique du patrimoine et le fonctionnement de l’administration. Nous apprenons également que Monsieur Bélaval devra rendre sa copie et faire des propositions à la fin de l’été, c’est-à-dire demain et même tout de suite.

Ces méthodes sont inacceptables et particulièrement déloyales à l’endroit de toutes celles et ceux qui au quotidien portent les politiques patrimoniales sous toutes leurs formes, dans leur complexité, leur diversité et leur richesse.

Que restera-t-il de ces politiques, de la direction générale des patrimoines, de ses services et départements lorsque Philippe Bélaval aura achevé sa besogne. Ce qu’il a fait du CMN, tel un joli laboratoire grandeur nature, est explicite, très très très clair. Son projet n’est pas un projet libéral, non, c’est un projet ultralibéral, un projet de rupture, un projet de démantèlement et de casse.

Alors, allez-vous laisser faire ? Allez-vous laisser monsieur Bélaval signer l’arrêt de mort de politiques constitutives de l’ADN de ce ministère depuis sa création en 1959 par André Malraux, et qui sont encore aujourd’hui l’un des moteurs les plus puissants de son action.

Transfert de gestion des agents du ministère aux établissements publics

Sur une intuition malheureuse, vous avez décidé de transférer la gestion de plusieurs centaines d’agents du ministère aux établissements publics suivants : Orsay-Orangerie, Versailles et, comme on se retrouve, le CMN.

Ce projet n’est en rien un projet d’amélioration des carrières et de gestion des personnels. Vous faites le choix d’affaiblir considérablement l’expertise des services centraux dans le domaine de la gestion du personnel sans pour autant construire les politiques ministérielles des ressources humaines dont nous manquons cruellement.

En vérité, vous donnez les clés du camion aux patrons des établissements et, en vous débarrassant de vos fonctionnaires, vous abandonnez votre capacité à agir dans tous les domaines du ministère.

La journée de grève du 19 juin proposée par les organisations syndicales CFTC, CGT, FSU, SUD et UNSA a été un franc succès. Vous devez entendre que les personnels ne veulent pas de votre projet ; un projet régressif, dangereux et contraire à leur carrière.

Allez-vous renoncer à inscrire au projet de loi de finances pour l’année 2019 le transfert des emplois et de la masse salariale aux établissements devant être concernés par ce projet dès janvier. Ce serait en effet, en plein négociation avec le ministère, un geste politique désastreux qui mettrait les personnels et l’intersyndicale dans une profonde colère, la négociation exigeant un zeste de loyauté… C’est à vous de laisser sa chance à la négociation.

Allez-vous y renoncer madame la ministre ?

« Administration centrale stratège », le ver est dans le fruit

Enfin, le chantier « Administration centrale stratège » est inscrit en caractères gras au menu du grand chamboule-tout piloté à tout berzingue par l’Elysée et Matignon pour tailler à la serpe dans les dépenses et les emplois publics.

Le simulacre de concertation que vous nous avez gracieusement concédé n’y changera rien.

Le jeu de massacre qui se prépare en petit comité et, là encore, dans l’opacité la plus totale n’est pas tolérable. Vous voulez vider l’administration centrale de ses missions, la couper de ses capacités d’action, de ses leviers opérationnels, la démettre de son expertise, couper, encore, massivement dans les effectifs : elle n’y résistera pas car elle n’en peut plus ; car les personnels n’en peuvent plus.

C’est parce que le ministère de la culture est constitué de nombreux établissements publics, de DRAC et de SCN qu’il a besoin d’une administration centrale forte, opérationnelle, renforcée dans son expertise pour mieux concevoir, mettre en œuvre et évaluer les politiques nationales en toute cohérence. Entendez cela.

Certes les difficultés de fonctionnement existent et les coopérations de travail comme les circuits d’information et de décision pourraient être meilleurs. Travaillons à cela ; nous y sommes prêts. Encore faudrait-il nous dire très précisément ce que vous comptez porter pour le devenir de l’administration centrale en termes de réorganisations. Les personnels attendent des réponses claires de votre part.

En outre vous annoncez votre plan de transformation du ministère pour le 25 juillet, c’est donc le moment ici de discuter de votre projet. Parlons-en !

Les personnels attendent aussi que les suppressions d’emplois cessent.

Allez-vous aussi faire cesser les suppressions d’emplois ?

Vous voyez madame la ministre, c’est clair et concis. Nous attendons des réponses similaires de votre part.

Pour conclure, permettez-nous d’avoir un mot et une pensée pour Vincent Berjot qui fut à la tête de la direction générale des patrimoines pendant six ans et qui part dans des conditions regrettables. Le traitement qui lui a été réservé n’est pas digne du ministère et n’augure rien de bon pour l’avenir.

VIVE LA CULTURE ET QUE VIVE LE MINISTERE DE LA CULTURE !

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