Un Musée national martyrisé de longue date
En 1972 le Musée National des Arts et Traditions Populaires était installé dans ses locaux actuels à Paris au Bois de Boulogne. Premier musée national d’ethnologie, issu de l’école scientifique de Georges-Henri Rivière, il fut une référence culturelle importante au Ministère, pour la France mais aussi au de dimension internationale.
En 1992, vingt ans après son ouverture, ce Musée National (Service à Compétence Nationale) fait partie des premières mesures de délocalisation envisagées par le Ministre de la Culture de l’époque Jack Lang.
En 1997, le projet de délocalisation du MNATP à Marseille est lié à la création d’un nouveau musée le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM).
En 2008, le projet de loi de finances pour 2009 du ministère de la Culture inscrit dans les Projets de performance annexés au PLF, le projet du MuCEM dans ces termes : « Le projet consiste en la création à Marseille du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM) à partir de la délocalisation et la transformation du musée des arts et traditions populaires (MNATP).»
2009 engage la restructuration effective du musée. Celle-ci ne sera jamais précédée d’une véritable réflexion sur les objectifs scientifiques et muséaux. Pire, 90 % des collections d’ethnologie de l’ex MNATP sont condamnés à « l’ensilage » dans un Centre de Conservation et de Ressources fermé au public. Le projet culturel et scientifique du musée est lui-même vide de sens comme l’ont montré les débats du CTP de la Direction générale des Patrimoines en 2010 consacré au MuCEM à la demande des organisations syndicales.
Un long combat des personnels du MuCEM ex MNATP !
Cela fera donc 20 ans que les personnels sont confrontés à un devenir totalement incertain de leur musée. Incertain pour la situation personnelle de chacun des agents, et incertain quant au devenir des collections et au projet scientifique du musée.
En janvier 2010 la CGT-Culture interpellait la Directrice des Musées de France afin d’ouvrir une négociation sur le devenir du MuCEM et de ses agents dans le cadre de la délocalisation de ce Service à Compétence Nationale, rappelant que le projet de changement de statut du SCN en EPA, l’installation d’une association de préfiguration, la mise en route d’un Partenariat Public Privé pour la construction des bâtiments à Marseille, l’externalisation de certaines missions et la fermeture du musée à Paris n’avaient donné lieu à aucune concertation avec les représentants syndicaux des personnels.
En décembre 2010 la CGT-Culture exigeait l’ouverture d’une négociation avec les représentants syndicaux pour l’application des droits et garanties pour les agents sur la base de ceux prévus par « la circulaire du 11 juin 1992 relative à l’accompagnement social des localisations en province des services de l’Etat et des établissements assimilés » (Cf. document joint), avec la mise en place d’un plan social :
concernant tous les salariés, titulaires et non titulaires sous CDI et sous CDD ;
sur le principe du départ volontaire sans avoir à re-postuler sur leur propre poste et dans le cadre d’une mutation d’office ;
dans les mêmes conditions de qualification, de rémunération et de régime indemnitaire quelle que soit la décision qu’ils prennent ;
le droit à des formations d’adaptation organisées en tant que de besoin ;
le droit à un reclassement pour tous les agents ne rejoignant pas Marseille avec la priorité à la mutation et la garantie pour les agents non titulaires du non licenciement à l’occasion de cette délocalisation ;
Le droit aux différentes indemnités liées à la mutation d’office et à la délocalisation ;
la prise en compte des dimensions familiales ;
la mise en place d’un comité de suivi constitué de l’administration et des représentants syndicaux afin de suivre l’évolution de la situation individuelle de chaque agent.
Le 6 janvier 2011, le Ministre de la Culture annonçait des mesures d’accompagnement, envisagées pour le personnel qui rejoindrait ou non le MuCEM délocalisé à Marseille.
Une démarche exceptionnelle des agents
Après les tergiversations de l’administration à construire un projet et une concertation, suite à de multiples mobilisations, Assemblées Générales, grève et occupation, les agents ont décidé de porter leur propre projet de plan social inspiré par la circulaire du 11 juin 1992 en intersyndicale MuCEM (CGT-FSU-SUD-CGC).
Forte de cette unité syndicale autour de ce projet, la négociation s’ouvre le 6 octobre à partir du texte de l’intersyndicale. Elle fera l’objet de trois autres réunions de négociation aboutissant le lundi 14 novembre, après que l’Assemblée Générale des personnels a voté favorablement en faveur du texte négocié, à la signature du protocole d’accord par le Directeur général du Patrimoine, M. Philippe BELAVAL d’un coté et la CGT-Culture, le SNAC-FSU, la CGC-Culture, SUD-Culture, la CFTC-Culture de l’autre.
Des ouvertures de droits et garanties pour tous les personnels
Ce protocole d’accord relatif au volet social de la restructuration du MuCEM (Cf. document joint) est construit « en référence à l’esprit et aux principes issus de la circulaire du 11 juin 1992 relative à l’accompagnement social des localisations des services de l’Etat et des établissements assimilés » (Préambule du protocole d’accord). Entre autres il garantit :
à tous les salariés sans exception : agents titulaires et non titulaires, salariés de droit privé de l’association de préfiguration et de la RMN,
le non licenciement de tous, agents non titulaires sous CDD et CDI « par le renouvellement de leur contrat en CDD dans le même niveau de qualification (groupe et indice de rémunération) » et « la poursuite de leur CDI » quelque soit « le changement d’affectation et fonction exercée » et salariés de la RMN « solutions spécifiques de maintien dans l’emploi « (ainsi que pour les agents du récolement comme du ministère de l’Agriculture),
qu’ « aucune des personnes … ne pourra se voir contrainte à un départ non volontaire pour un poste situé au-delà de l’Ile de France »,
que « les agents appelés à suivre le MuCEM à Marseille … se verront appliquer la procédure de mutation d’office et pourront bénéficier de toutes les indemnités réglementaires prévues dans ce cadre »,
le maintien des régimes indemnitaires et l’ouverture des droits « aux dispositifs financiers d’accompagnement du décret n°2008-366 du 17 avril 2008 »,
à tous les agents (titulaires et non titulaires) « les reclassements en dehors du MuCEM » et « le droit à retrouver une affectation correspondant à leur qualification et expérience » dans un des services ou établissements publics … en Ile de France ou dans une région correspondant à leur choix et de façon prioritaire » dans les CAP, l’administration prenant « le cas échéant, les mesures de gestion nécessaires à la mise en œuvre effective de ce dispositif de priorité. »
la prise en « compte des temps de trajet selon leur situation individuelle et familiale. » et « la dimension familiale »,
le droit à la formation, « l’accueil des agents et de leur famille à Marseille »,
la mise en place d’un Comité de suivi du protocole d’accord qui se « réunira régulièrement » afin de suivre « de façon précise et détaillée l’avancement du processus de reclassement individuel » de chacun des dossiers des agents.
Les agents ont gagné par la lutte des droits et garanties que la loi sur la mobilité ne leur ouvrait pas.
Maintenant il reste à défendre les filières menacées par les projets d’externalisation, les missions scientifiques et les collections ethnologiques délocalisées à Marseille, ainsi que le statut Service à Compétence Nationale du Musée qui doit être examiné en juillet 2012 …
23 11 2011