Les Présidents, les gouvernements défilent les uns derrière les autres. Les ministres de la culture tournent trois fois plus vite. Une chose toutefois ne change pas en haut lieu : les femmes et les hommes du service public de la culture, des métiers de la culture sont traités comme s’ils étaient en trop dans la société.
Il ne se passe pas un jour sans que la culture ne soit exposée à la censure la plus froide et sournoise qui soit, au ministère comme dans un grand nombre de collectivités : celle des comptables et des mercenaires de la modernisation, d’autant plus sûrs d’eux-mêmes qu’ils sont ignorants et coupés des réalités. Le politique est coupable d’avoir totalement abandonné le pouvoir à la horde des faucheurs. C’est d’autant plus terrible aujourd’hui !
La RGPP de Sarkozy, la RGPP bis de Hollande, les désengagements successifs, les abandons ou externalisations de missions ont considérablement rétréci le champ comme la liberté d’action des acteurs et des forces vives de la culture.
Action publique 2022 s’inscrit dans la logique brutale des réformes qui l’ont précédée. Tout ce qui avait été construit patiemment, se fissure, se casse, et va même jusqu’à disparaître. Sous le nom de code « Action publique 2022 », les moyens humains, les structures et le service public de la culture pour toutes et tous en prennent encore un sacré coup.
Faute d’ambition et d’imagination, de dialogue et de négociations, de crédits suffisants, de personnels, de considération du travail, les politiques publiques culturelles sont sacrifiées sur l’autel du profit. La société et les solidarités ne peuvent que pâtir de tels choix.
Certes, il faut réorganiser l’administration centrale, mais il ne faut pas la réduire à une entité hors-sol. Notre société fortement divisée a besoin d’une administration forte qui assure la cohérence des politiques publiques culturelles, et un égal accès au service public de la Culture à tous, sur l’ensemble du territoire.
La volonté d’affaiblir notre ministère en l’éclatant façon puzzle ne fait que diminuer sa capacité de contrôle et de coordination. De plus, en multipliant les décideurs on multiplie aussi les risques de corruption.
Avec l’externalisation des missions, des outils, on lui retire toute possibilité d’action, de réaction ou d’ajustement des politiques qu’il doit porter.
S’agissant des musées nationaux, en moins de 20 ans ils ont changé radicalement de visage. Les plus grands et plus connus sont désormais quasiment totalement autonomes. Ils se pensent et se gèrent comme des entreprises : des musées-entreprises ouverts à la marchandisation et se livrant une concurrence effrénée.
Il fallait libérer ces musées, les moderniser en leur donnant le statut d’Établissement public à caractère administratif – EPA ?! Aujourd’hui paradoxalement leur modèle économique est plus fragile que jamais. Leur modèle culturel pose aussi question.
Action publique 2022 se propose d’achever ce chantier de soi-disant modernisation. C’est-à-dire de régler le sort des 17 derniers musées Service à compétence nationale – SCN. Comment ? Par fusion dans un grand EPA ombrelle ou par fusion absorption par les EPA existants.
Pourtant le statut de SCN est parfaitement adapté à la dimension et aux missions de ces musées. Il permet à l’état de se responsabiliser et garantir à terme une logique de réseau de service public.
Les SCN ce n’est pas le problème mais l’une des solutions pour construire le musée du XXIe siècle. Un musée en partage, maison commune des publics, musée citoyen, garant des droits culturels. Un musée au cœur de la cité, impliqué dans la lutte contre la ségrégation culturelle et pour une démocratie culturelle.
La modernité c’est donc une cohabitation intelligente entre les SCN et les EP au service de l’intérêt général. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas accepter cette politique de casse et de démantèlement définitif du réseau des musées nationaux.
Venons-en aux Archives. Nés du souffle de la Révolution française, les services publics d’archives sont ouverts à tous, citoyens Français comme résidents étrangers, pour une simple consultation ou pour une recherche approfondie : aux Archives, on vient rechercher ses ancêtres, consulter les documents pour son master d’histoire, écrire l’histoire de demain ou trouver trace d’un décret de naturalisation, d’un acte de carrière… c’est ici que s’écrit la petite comme la grande histoire, c’est ici que nos droits, des origines à nos jours sont préservés et disponibles.
Les archives sont donc au cœur de la démocratie et forment un patrimoine par nature universel.
Moins de 1/10 000ème des dépenses du budget de l’État sont consacrées à notre mémoire collective. Pourtant, les archives sont aujourd’hui une nouvelle fois menacées de mort.
Et aujourd’hui, le Président actuel ne s’embarrasse plus d’idéologie, il liquide. C’est l’Action Publique 2022, plan de liquidation et de privatisation des services publics.
Plutôt que de construire de nouveaux bâtiments, de créer des emplois statutaires de fonctionnaires en nombre suffisant, d’augmenter les budgets d’investissement et de fonctionnement, la ministre préfère les solutions radicales. C’est la politique des « archives essentielles » : collecter moins, réévaluer en vue d’éliminer les archives définitives, courantes et intermédiaires pour « faire de la place », numériser les archives pour détruire les originaux, amputer les équipements existants à Paris avec le plan immobilier CAMUS…
Triez, éliminez !
Cela a déjà été la destruction et la perte définitive en août 2016 de la collection complète des déclarations individuelles d’imprimeurs et d’éditeurs pour le dépôt légal. Et ce n’est pas fini, l’administration des Archives s’apprêterait à pilonner en toute discrétion les formulaires anonymes individuels d’interruption volontaire de grossesse (IVG).
Il en va de la défense de la démocratie, des droits de tous et de chacun !
Mais, à la CGT, nous pensons qu’arrêter le bras des casseurs n’est pas suffisant. Exigeons et apportons ensemble, par et avec tous, de profondes transformations aux politiques culturelles.
Nous vivons dans un monde en très rapide évolution, nous vivons même des mutations inouïes. Nos combats pour la culture, c’est finalement permettre à chacun d’être pleinement présent au monde, pleinement acteur de sa transformation. La construction d’un autre avenir passe inévitablement par là ou elle ne se produira pas.
Après l’Appel de Montreuil, il est essentiel d’être force de proposition, pour construire ensemble, artistes, professionnels, élus et citoyens, les politiques culturelles publiques du XXIe siècle.
Le 26 mars 2018, c’était donc, au Nouveau Théâtre de Montreuil devant 250 personnes, l’acte de naissance des Itinérances des arts, de la culture et des patrimoines (#ITAC2022).
Organisées dans le haut de Montreuil ou dans les vallées cévenoles, en grande banlieue ou dans un village de la grande « diagonale du vide », dans un bistrot du 11ème arrondissement parisien ou dans un restaurant d’une petite cité portuaire, au plus près des habitants, partout en France, dans des lieux éloignés de la culture ou au contraire, au plus proche, les Itinérances ont vocation à recueillir la parole, susciter la rencontre et le débat autour de la culture et des politiques culturelles.
A travers ces initiatives citoyennes et participatives, il s’agit de rendre compte de ce que sont les arts et la culture en France. Artistes, spectateurs, professionnels, amateurs, associations, collectifs… Adressez de courtes vidéos d’initiatives, de spectacles, d’ateliers, de témoignages. Nous pourrons ainsi esquisser les contours d’une réalité palpable, dynamique et populaire des arts et de la culture en France répondant aux habituels arguments populistes de nos dirigeants prompts à dénoncer ce qu’ils nomment « une culture élitiste et des professionnels corporatistes« .
Libre à chacun-e d’apporter sa contribution, filmée, écrite, dessinée, son témoignage ou de proposer l’organisation d’une initiative (conférence, réunion publique…) sous le label #ITAC2022, par ce formulaire, sur le site https://www.itac2022.org/.
Ces contributions permettront d’esquisser les contours d’un projet commun et citoyen, une loi cadre porteuse des plus belles ambitions pour les arts, la culture et les patrimoines.
L’appel de Montreuil
Suite à la diffusion dans MEDIAPART de l’Appel de Montreuil pour les arts, la culture et les patrimoines qui a recueilli à ce jour plus de 11 000 signatures, nous avons besoin de vous pour conforter la mobilisation et imaginer ensemble les politiques culturelles de demain !
Signer, c’est affirmer que les arts et la culture sont une cause nationale et citoyenne, qu’ils ne peuvent être soumis à une seule logique de rentabilité.
Continuez à signer et à le faire signer : https://www.mesopinions.com/petition/art-culture/appel-montreuil-arts-culture-appeldemontreuil/38321
La contribution en musique et en chanson de la CGT-Culture :
A écouter et à faire écouter !!!
A partager et à faire partager !!!
Ensemble, faisons le choix de préparer l’avenir autrement
Vive la Culture et que Vive le ministère de la Culture !
Paris, le 4 avril 2018