Le président Bélaval ne s’est jamais caché de vouloir gérer en direct les effectifs titulaires du CMN mais jusqu’à présent il s’est toujours heurté au refus du Ministère. Cependant, le contexte change. Tout d’abord, le sous-effectif, résultat de plusieurs années de suppressions d’emplois et d’insuffisance de concours, n’a jamais été aussi insupportable (59 départs non remplacés depuis 2012). Le fonctionnement des services en est considérablement entravé tandis que de plus en plus de monuments ferment par manque d’effectif. Les personnels sont les premiers à en subir les conséquences au travers des conditions de travail qui ne cessent de se dégrader. En outre, la levée de la dérogation, qui vient d’être voté au Parlement, change la donne puisque les 750 contractuels du CMN deviennent potentiellement titularisables. Et Monsieur Bélaval, comme tant d’autre dirigeants d’établissements publics veut garder la main sur « ses » personnels.
Qu’est-ce que la gestion directe ?
Il existe deux statuts des personnels au CMN :
- Les agents titulaires (fonctionnaires) dont l’employeur est l’État. Bien qu’ils soient affectés au CMN, ils sont rémunéré sur le budget de l’État. De même tous les aspects de leur carrière est géré par le Ministère de la Culture.
- Les agents contractuels, employés et rémunérés directement par l’établissement. Cela est rendu possible par la dérogation à l’emploi dont bénéficie le CMN et qui lui permet de recruter sous contrat. En effet, dans la fonction publique, tous les emplois devraient, en principe, être pourvus par des fonctionnaires mais le CMN déroge à cette règle.
La gestion directe ou déconcentration des actes de gestion, consiste à transférer la gestion des agents titulaires au CMN. Le Ministère transfert les postes et la masse salariale sous forme de subvention, afin que le CMN puisse rémunérer directement les agents. Sans cela, l’établissement n’aurait pas les moyens de payer les 469 fonctionnaires qui lui sont affectés.
Quelles conséquences pour les agents ?
Bien que la gestion directe ne remette pas en cause le statut des agents (les fonctionnaires le restent), le fait d’être géré par un établissement et non par le Ministère change beaucoup de choses. Tout d’abord, le CMN pourrait être autorisé à recruter directement les fonctionnaires. Cependant, le CMN est loin d’en avoir la capacité opérationnelle ni les compétences. L’organisation de concours suppose une expertise et une organisation que n’a pas l’établissement. En effet, le concours, voie de recrutement des fonctionnaires, est censé garantir l’impartialité des recrutements. Ceci n’est pas forcément le cas pour les contractuels dont le recrutement s’opère de gré à gré, comme dans le privé. Avec le pouvoir de recrutement viens le pouvoir disciplinaire. Le président du CMN pourrait ainsi infliger des sanctions de 1er et 2ème groupe aux agents titulaires, (avertissement et blâme) sans en référer au Ministère. Toutefois, pour les sanctions plus lourdes, la CAP continuerait à être consultée. Le CMN rémunérerait directement les agents titulaires, que ce soit la rémunération principale ou le régime indemnitaire (primes). Si la rémunération principale est encadrée (grille de salaires et évolution à l’ancienneté) en revanche le régime indemnitaire l’est beaucoup moins et représente la porte ouverte à toutes les forme de dérives, d’abus et d’inégalité de traitement entre agents de même statut et de même catégorie. Enfin, la gestion directe est une entrave à la mobilité car même si les CAP continuent a jouer leur rôle, les règles budgétaires relatives aux plafonds d’emplois peuvent retarder voir bloquer les demandes de mutation. En effet, lorsqu’un agent veut exercer une mobilité, son poste budgétaire doit être transféré, vers le CMN (en cas de mobilité entrante) ou vers le Ministère ou un autre établissement (en cas de mobilité sortante). Mais il arrive que l’administration d’accueil n’ai pas ou plus les postes nécessaires. L’agent se retrouve donc bloqué et devra attendre qu’un poste se libère. Ainsi, la gestion directe constitue un frein supplémentaire au droit à la mobilité des fonctionnaires.
Une fausse solution à un vrai problème pour l’établissement
Lors des négociations sur le préavis de grève du 31 mars dernier et dont les revendications portaient essentiellement sur le sous-effectif et l’emploi, Monsieur Bélaval a une fois de plus fait montre de son impuissance puisque le recrutement et l’affectation des agents titulaires restent la prérogative du Ministère. Ministère qui n’a d’ailleurs pas daigné nous recevoir alors que le préavis était pourtant adressé à Madame Azoulay ! En revanche, le président Bélaval nous a resservi son discours habituel sur les soit disant vertus de la gestion directe, à une nuance près, il l’a fait cette fois, de manière totalement ouverte et décomplexée. Selon lui, la gestion direct permettait au CMN de recruter les effectifs qu’il lui manque. Faux ! Car sur les 481 postes transférés, 12 sont vacants et le Ministère transférerait la masse salariale correspondant uniquement aux emplois pourvus. Quand bien même le CMN disposerait des postes, il n’aurait pas de quoi les payer et dans ces conditions, impossible de recruter. En outre, le nombre de postes transférés ne suffira pas forcément à combler l’entièreté des besoins car de l’aveu même de la direction, il manquerait près de 80 postes sur l’ensemble de l’établissement (59 départs non remplacés et des nouveaux besoins). Ces 80 postes ont bien été ouverts il y a plus d’un an mais seule une infime minorité a été pourvu. Depuis, quasiment aucun avis de vacance n’a été publié !
Les 469 titulaires seraient gérés par les services de la DRH du CMN, sans aucun moyens ni effectifs supplémentaires. Ce qui représente un surcroît de travail très important pour des services déjà saturés et pour nos collègues de la DRH qui ne sont pas nécessairement formés aux questions de l’emploi statutaire. Le précédent de la gestion dite de proximité (gestion des congés et arrêts maladie des titulaires) est à titre d’exemple édifiant et a été source de nombreuses difficultés dont les agents titulaires ont fait les frais.
En résumé, la gestion directe n’est pas la solution au sous-effectif.
La gestion directe, ne sert qu’à satisfaire l’ego des dirigeants d’établissements publics qui se prennent pour des « patrons » d’entreprise privé !
Le SNMH-CGT revendique :
- Pas de déconcentration des actes de gestion
- La levée de la dérogation pour TOUS les emplois du CMN
- La titularisation pour tous les contractuels qui le souhaitent
- La titularisation doit se faire sur le titre II (budget de l’État)