Le service public de la culture en devenir ! Les écoles nationales supérieures d’architecture

A MADAME ABDUL MALAK, MINISTRE DE LA CULTURE 

Madame la Ministre,

Le 24 mai vous avez adressé aux agents du ministère votre premier message, rendant hommage au personnel pour ces cinq dernières années.

Effectivement les agents ne ménagent pas leurs efforts. Mais ce depuis bien plus longtemps. Oui, c’est bien le cas car les agents du Ministère ont le sens du service public.

Vous n’ignorez pas, Madame la Ministre, que les 20 écoles nationales supérieures d’architecture tanguent, tanguent en permanence. Elles sont dans des tourmentes incessantes face aux injonctions et contraintes inadaptées à leur fonctionnement.

Oui, c’est bien grâce aux agents et à leur engagement individuel et collectif, à leurs convictions, que les missions qui sont les nôtres sont encore assurées, envers et malgré les politiques destructrices menées sous couvert de progrès, voire d’excellence.

Alors que la dégradation des ENSA s’est accélérée ces dernières années, les personnels -agents administratifs et techniques/ enseignants- sont aujourd’hui confrontés à une multiplication des tâches, à une baisse de moyens, à la nécessite de recherche quotidienne de solutions pour que les enseignements soient assurés, pour que les diplômes soient garantis, pour que la recherche existe et pour préserver autant qu’il en est encore possible le présent et l’avenir des étudiantes et des étudiants.

Cet investissement, Madame la Ministre, va bien au-delà des fiches de poste, des tâches définies et du temps de travail.

Mais cela ne pourra pas durer.

Les constats et alertes s’accumulent (rapports et enquêtes d’inspections successives, courriers et motions des instances de gouvernance des écoles, alertes et saisies des organisations syndicales, mises au jour dans la presse nationale et sur les réseaux sociaux, questions à l’assemblée nationale…).

Demain, il ne pourra plus être cité, tel que ce fut le cas en conclusion de la dernière inspection, « Et pourtant elles tournent ».

Par votre engagement précédent comme conseillère Culture auprès du Président la République

  • vous n’ignorez pas la dégradation accélérée des écoles, ni les dysfonctionnements croissants ;
  • vous n’ignorez pas le sous-effectif et l’urgence à débloquer des moyens (humains, financiers, immobiliers…) ;
  • vous n’ignorez pas les effets calamiteux de la réforme imposée de 2018, imposée sans moyens;
  • vous n’ignorez pas l’appauvrissement des personnels et la grande fragilité économique et sociale de nombre d’agents, enseignants précaires à temps incomplet composant un tiers de l’effectif ;
  • vous n’ignorez pas la surcharge de travail, les conditions dégradées, les risques psychosociaux, le turn-over et la difficulté à recruter, le stress et les arrêts maladie…
  • vous n’ignorez pas le climat tendu, les abus de pouvoir, le non respect des droits des agents et des représentants du personnel ;
  • vous n’ignorez pas que la moyenne de dépense pour un étudiant dans l’enseignement supérieur est de 13 000 euros pour 8 500 euros en école d’architecture.

Vous n’ignorez pas non plus les conséquences de cette situation avec injonction au « toujours plus » (avec toujours moins), sur les quelque 20 000 étudiantes et étudiants.

Ces conséquences identifiées, selon l’angle de vue, comme mal-être pour certains et maltraitance pour d’autres.

Alors, Madame la Ministre, nous ne négocierons plus la taille des rustines censées tout résoudre.

Nous avons des devoirs envers les étudiantes et étudiants et leur famille.

Nous attendons maintenant une décision politique pour le service public de l’enseignement de l’architecture et plus largement de la culture.

Il s’agit là de votre responsabilité de Ministre – responsabilité politique, sociale, économique, culturelle bien sûr et humaine- et de celle du gouvernement.

Colonnes de Buren, 10 juin 2022

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