Après une première tentative que nous avions mise en échec en 2019, le ministère de la Culture tente à nouveau d’instituer l’usage gratuit pour les usages commerciaux des images des fonds photographiques patrimoniaux.
Sous le prétexte fallacieux d’accroitre la notoriété des œuvres des collections nationales, comme si la Joconde et les chefs œuvres des musées nationaux n’étaient pas déjà mondialement connus !
La gratuité des usages commerciaux des images de notre patrimoine et des œuvres d’arts conservées dans les musées de France, idée séduisante de prime abord, n’est en fait rien d’autre qu’un cadeau en or aux géants de l’internet dont l’appétit est sans limite.
Depuis de longues années, les GAFAM et notamment Google mais aussi plusieurs groupes multinationaux de l’édition privée exercent un très fort lobbying partout dans le monde pour obtenir l’accès commercial gratuit aux photographies des œuvres des musées et monuments.
C’est un enjeu commercial majeur pour Google, les GAFAM et les éditeurs privés qui dans tous les domaines de la création cherchent à se débarrasser des obstacles légaux et de la réglementation en vigueur pour mieux pouvoir contrôler la diffusion des contenus. Leur modèle économique est tel qu’un discours naïf ou complaisant sur l’open data leur ouvre au vrai un marché immense leur permettant à brève échéance de décupler leurs profits.
Google et les Gafam ont ciblé la France comme le maillon faible et décisif pour faire basculer les images des musées du monde dans la dérégulation totale.
Le passage des musées à la gratuité de l’utilisation commerciale des photos entraînerait une vague de fond internationale, alors même que les musées allemands, anglais et italiens ont tous refusé cette ouverture des utilisations commerciales à des usages gratuits.
En France en 2023, pays qui par le passé a su pourtant prendre la tête d’un mouvement européen de défense de l’exception culturelle, il en va tout autrement. Ainsi, nous avons appris que le Service des Musées de France du ministère de la Culture conduit à nouveau depuis plusieurs mois, en toute opacité, une étude partiale et orientée pour instituer cette gratuité des usages commerciaux des photographies des œuvres des musées et des monuments.
Le lobbying conjoint de Google, des Gafam et des multinationales de l’édition, de Sundar Pichai le patron de Google et de Vincent Bolloré le patron d’Hachette, trouve ainsi en catimini un relais actif auprès d’une poignée de fonctionnaires au sein même du ministère de la Culture. Alors même que, en même temps, Rima Abdul Malak, la ministre de la Culture et Emmanuel Macron n’ont de cesse de se présenter comme des défenseurs de notre souveraineté́ culturelle !
L’agence photographique de la Réunion des Musées Nationaux-Grand Palais et ses soixante salariés sont aux premières loges. Sa mission de couverture photo est en effet en grande partie financée par la cession payante des droits commerciaux d’usage. Son équilibre économique est directement menacé par l’Open data.
Comme d’autres missions essentielles au rôle historique de mutualisation et de péréquation de la RMN sacrifiées au nom de la marchandisation culturelle, c’est au tour de l’agence photo d’être dans le viseur. L’agence photo, ses missions, ses emplois, son expertise sont plus que jamais sur la sellette.
Et demain, c’est tout le secteur de la photographie qui sera la victime de cette libéralisation sauvage pour le profit unique des multinationales.
La CGT se devait de lancer cette alerte fort et clair pour arrêter au plus vite le bras des casseurs.
Nous demandons l’abandon immédiat de ce projet de démantèlement programmé de l’agence photo dont les conséquences culturelles, économiques et sociales seraient désastreuses.
Paris, le 4 juillet 2023