OAC / Accompagnement social de la réforme : une plaie qui reste à vif

Après le CTM, le CTAC en vue, mais dans quelles conditions ?

A l’instar du Comité technique ministériel (CTM) du 12 novembre dernier, et malgré nos multiples récriminations, le Comité technique d’administration centrale (CTAC) se tiendra lui aussi en mode dégradé – à distance – les 3 et 4 décembre prochain.

Après l’examen du projet de décret constitutif de la nouvelle organisation de l’administration centrale dans des conditions très difficiles au CTM (cf. notre communiqué du 18 novembre 2020 : « Retour sur le Comité technique ministériel du 12 novembre 2020… que nous ne sommes pas près d’oublier ! »), le CTAC aura la lourde tâche de se prononcer sur pas moins de 5 arrêtés et 5 décisions. Or, contrairement aux éléments de langage de la ministre et de son cabinet repris en chœur par l’administration, cette réorganisation aura de façon immédiate des conséquences très importantes sur les missions, le sens même du travail, et immanquablement sur les conditions de travail des personnels. 

Un refus catégorique et incompréhensible de négocier

Forts de l’expérience des précédents épisodes de réforme, nous avons très tôt demandé l’ouverture de négociations visant à assurer à chacune et chacun un niveau élevé de garanties et des droits opposables s’inscrivant dans un cadre collectif clair et transparent. Nous avons aussitôt assorti cette demande formelle, susceptible d’aboutir à un protocole d’accord, de la proposition d’un comité de suivi paritaire chargé de veiller à ce que personne ne reste au bord du chemin.

Mais voilà des mois que nous nous époumonons en pure perte, des mois que nous nous heurtons à un mur – celui du refus, de l’aveuglement, et de l’entêtement d’une administration dont l’archaïsme et la rigidité en matière de dialogue social le disputent à un autoritarisme inutile et à une immaturité démocratique chronique.

Injonctions contradictoires et double langage à tous les étages

Alors que le gouvernement auquel elle appartient a d’ores et déjà engagé des discussions avec les fédérations syndicales concernées en vue de prendre, d’ici à la fin de l’année, une ordonnance favorisant la négociation et les accords collectifs dans la Fonction publique, pour Roselyne Bachelot-Narquin, à la culture, réforme ou pas, le mot négociation est interdit et banni du vocabulaire officiel.

Ce gouvernement, c’est vrai, a l’art des injonctions contradictoires, des flottements et des revirements et la résidente de la rue de Valois a l’air de s’en accommoder parfaitement.

Une circulaire unilatérale et des méthodes un tantinet paternalistes

Aussi, la ministre, en accord avec elle-même et ses principaux collaborateurs a-t-elle décidé de prendre unilatéralement une circulaire dont l’objet « Accompagnement des agents dans le cadre de l’OAC » soulève forcément des questions sociales majeures et recèle de nombreux facteurs de risques. Sans ce que cela ne puisse aucunement atténuer la coloration un tantinet paternaliste et désuète de cette méthode politique, le cabinet nous aura toutefois concédé une pauvre réunion de présentation verrouillée à l’avance à double tour.

Quelles avancées sociales !

A ce stade et pour aller à l’essentiel, la ministre s’engage personnellement à ce qu’aucun poste ne soit supprimé dans le cadre de l’OAC ; à ce que la rémunération des agents soit maintenue tout comme leurs possibilités de promotion ; à ce que les agents transférés n’aient pas besoin de candidater sur leur nouveau poste ; à ce que l’OAC n’entraîne aucun changement de résidence administrative non souhaité. On est là devant de telles avancées sociales que l’émotion n’est pas loin de nous étreindre.

Un oubli n’arrive jamais seul

Plus sérieusement, la ministre, dont la fibre sociale ne saurait certainement supporter aucun doute, oublie un peu vite tout de même le contexte dans lequel elle agit.

Elle oublie que l’administration centrale aura connu 600 suppressions d’emplois en un peu plus d’une décennie. Elle oublie que 50 emplois auront été détruits sur l’exercice 2020 et que 20 le seront encore sur l’exercice 2021. Elle oublie en outre que la dérégulation statutaire n’a cessé de se propager ces dernières années pour atteindre des proportions très inquiétantes.

Elle oublie qu’en matière de rémunération, le ministère de la culture est un ministère pauvre marqué par le cumul des inégalités et de façon de plus en plus préoccupante par des situations sociales parfois très précaires. Elle oublie que les déroulements de carrière sont indigents et confinent souvent au néant.

Elle oublie que le ministère qu’elle dirige, trop content de se payer de mots tels que modernisation, rationalisation, optimisation ou économies d’échelle a perdu en route la notice de la gestion anticipée des emplois et des compétences. Elle oublie que malgré des efforts dans le domaine de la formation, les parcours professionnels et les possibilités d’évolution sont désespérément obstrués.

Elle oublie enfin, et cela pèse lourd dans le désarroi et la fatigue accumulée par les agents, que, selon les derniers chiffres connus (source : Bilan santé et sécurité au travail 2018), en 2018, le ministère dans son ensemble aura connu 84 projets d’aménagement et de réorganisation impactant expressément les conditions de travail. Elle oublie par conséquent ce que la folie de la réorganisation permanente engendre de risques psychosociaux et de souffrance.

De la réforme érigée en dogme au mépris de la démocratie sociale

C’est donc dans ces conditions déplorables et vent debout contre ce refus incompréhensible et inacceptable de négociations sociales que nous allons aborder les 3 et 4 décembre au CTAC, par le menu des textes réglementaires, une réforme concernant – de l’aveu de l’administration – plus de 260 agents.

A l’heure qu’il est, nous ne disposons toujours pas de matrices de passage au 1er janvier 2020 précisant les postes (quotité de travail, équivalent temps plein travaillé), les fonctions, le statut, les catégories, la cotation indemnitaire, mais uniquement de listes de transferts incomplètes voire erronées pour ce qui concerne les transferts des DG vers le SG et la nouvelle délégation.

Ainsi, nous nous dirigeons vers l’un des CT les plus importants de la dernière période, privés en grande partie des informations pourtant requises par les textes en vigueur et nécessaires à l’exercice plein et entier de notre mandat électif.

Quitte à être taxés de naïfs et nonobstant nos désaccords de fond sur les motivations politiques de cette énième réforme, on aurait pu espérer au moins pouvoir discuter loyalement de tout ce qui fera l’avenir des agents et de leur travail, mais c’était sans compter sur l’obstination et le dogmatisme de nos interlocuteurs. C’était sans compter sur cette forme d’acharnement à réformer et à réformer encore, à marche forcée et sans ménagement pour les femmes et les hommes qui font avancer ce ministère.

Les agents méritent mieux qu’une circulaire de misère  !

Paris le 1er décembre 2020

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