Suite à une alerte émise par le SNMH-CGT Culture le 10 juillet 2019, le Centre des monuments nationaux a convoqué une séance extraordinaire du CHSCT Paris siège petite couronne consacrée aux suites de l’incendie de Notre-Dame de Paris ce vendredi 26 juillet.
Des alertes successives de la CGT
Avec l’incendie de la cathédrale du 15 avril c’est près de 370 tonnes de plomb qui ont été dispersés sur le site et les quartiers avoisinants. Dans les semaines qui ont suivi l’incendie, nous alertions en CHSCT ministériel du 15 mai sur l’absence de suivi médical des agents de l’Île de la Cité qui étaient retournés sur le site dans les jours ayant suivi l’incendie sans protections adaptées. Ces agents n’avaient pas été identifiés par la médecine de prévention du CMN comme du ministère et ont par la suite pu bénéficier d’un suivi médical.
De la même manière le 20 juin nous alertions le CMN de la probable forte pollution au plomb de la Sainte-Chapelle et de la Conciergerie, ce qui entraîna la prise de prélèvements qui ont établi une forte pollution de plusieurs postes de travail. L’administration a alors décidé de faire procéder au nettoyage des locaux contaminés par les prestataires habituels et a informé les agents sur la possibilité de demander un suivi médical auprès de la médecine de prévention. Les résultats de ces prélèvements particulièrement élevés nous ont conduits à lancer cette alerte CHSCT auprès du CMN.
En effet, en l’absence de confinement du chantier de Notre-Dame, le site demeure une source continue de pollution. Les particules fines présentes sur l’Île de la Cité, à l’extérieur et à l’intérieur des monuments sont susceptibles de ré-envol constant.
Il s’agit de prendre en considération et avec sérieux la portée d’une pollution qui ne cesse, et ne cessera pas, même après une dépollution des monuments faite dans les règles de l’art. Et contrairement à ce qui nous a été dit, l’intoxication se fait autant par inhalation que par ingestion.
L’incroyable déni du CMN
Face au déni exprimé par l’administration et ses « experts » qui a présidé à la tenue de cette séance consacrée aux conséquences possibles de la pollution au plomb sur la santé des agents, faut-il envisager qu’il ne s’agissait de tenir cette instance que pour la forme ?
Après avoir reçu un dossier initialement vide de tout document support concernant les mesures de prévention prévues par le CMN ainsi que des modalités et du calendrier de leur mise en œuvre, les représentants du personnel sont consternés d’entendre que leur intervention sur le sujet ne serait qu’un simple réflexe en réponse à un « battage médiatique » (sic). Si « battage » il y a, il se fait l’écho des scientifiques, des associations, des syndicats CGT et des riverains qui s’inquiètent du peu d’informations et de mesures de prévention tangibles prises par les organismes publics responsables (Agence régionale de santé et Mairie de Paris notamment). Pour information, au moment où nous écrivons ces lignes, une crèche et deux écoles sont fermés par mesure de précaution et le chantier de restauration a été suspendu…
Face à la gravité des conséquences liées à une exposition au plomb exceptionnelle qui dépasse toutes les normes reconnues, le CMN n’est-il préoccupé que par la nécessité de masquer son absence d’initiatives dès les premiers jours mais aussi dans les mois qui ont suivi, et encore actuellement ?
Il semble que le CMN n’ait pas pu – ou voulu – prendre les mesures secondaires de prévention (éviter des dommages et interventions d’évitement) – à défaut de primaires (éviter la survenue d’un risque) – et s’arc-boute sur la notion d’absence de risques particuliers pour les agents (on notera qu’aucun des monuments impactés n’a fermé à aucun moment depuis l’incendie du 15 avril). On répond à un agent qui s’interroge sur ce qu’elle a potentiellement subi, que de fait les agents sont moins à risque que le reste de la population, et qu’après tout fumer, faire de la céramique, boire dans un verre en cristal, marcher sur un quai de RER, etc.… constituent tout autant un risque… On élabore longuement sur la pollution due à l’essence au plomb jusqu’en 2000… La seule recommandation qui revient inlassablement est celle de prendre la précaution de se laver les mains… Les bras nous en tombent !
Quid des acteurs du CHSCT ?
Nous sommes interpellés par le constat que ni les assistants de prévention, ni les représentants du personnel n’ont été associés voire informés des rendez-vous pris pour des interventions de relevés de mesure ou de nettoyage. Celles-ci se feraient-elles à dessein en « catimini » ? On apprend plus tard que des agents d’entretien ont certes porté des combinaisons jetables, mais ne portaient ni masques ni gants lors d’un dépoussiérage partiel des colonnes de la chapelle basse de la Sainte-Chapelle…
Cinq entreprises prestataires différentes en co-activité à la Sainte-Chapelle n’ont été ni informées ni correctement protégées des conséquences de la pollution du site suite à l’incendie du 15 avril, alors que nous avions expressément demandé lors du comité technique du 4 avril, le respect des obligations inscrites dans la charte sociale du ministère de la culture par le CMN vis-à-vis des employés des entreprises extérieures. Ce sont les agents d’entretien, les vigiles procédant à la détection, les audioguides, les ouvriers travaillant sur le chantier en cours, l’équipe des organisateurs de concerts qui sont ainsi concernés et dont les lieux de travail n’ont fait l’objet pour la plupart d’aucun prélèvement pour s’assurer de leur salubrité.
Quelques avancées néanmoins
La tenue de ce CHSCT extraordinaire aura au moins servi à ce que la Sainte-Chapelle qui témoigne encore de taux élevés de pollution au plomb soit non pas « nettoyée » mais dépolluée par une entreprise spécialisée et que de nouveaux prélèvements soient faits par la suite, avec un suivi en CHSCT…
Nous avons également demandé que des prélèvements soient faits sur les autres monuments de Paris : Arc de Triomphe, Palais-Royal (pollution dans des sols nus, présence d’enfants et de femmes enceintes), Chapelle expiatoire, Panthéon.
Une note de l’administration intitulée « Informations risque plomb », qui ne porte ni en-tête de la direction qui l’a émise, ni signature… a été diffusée par mail dans les heures qui ont suivi le CHSCT, et distribuée aux agents au cours du week-end contre signature de bonne réception…
En tant que représentants du personnel, nous resterons vigilants à ce que les mesures demandées en CHSCT soient effectuées par des entreprises spécialisées, et dorénavant dûment notifiées en amont de leur mise en œuvre aux organisations syndicales.
Paris, le 29 juillet 2019.