La Cité de la Céramique, établissement public à caractère administratif (EPA) depuis 2010 sous tutelle de la DGCA, qui regroupe les sites de Sèvres et de Limoges (musée Adrien Dubouché), va dans les prochains mois revoir en profondeur la sécurité du site de Sèvres, lequel comprend la manufacture et le musée, implantés sur un ensemble de 4 hectares avec 24 bâtiments classés.
La situation était devenue à ce point préoccupante que le ministère de la Culture alerté sur les carences en matière de protection de l’établissement, a confié en début d’année un audit à l’inspection des patrimoines qui, avec le concours d’un cabinet spécialisé en sûreté, a débouché sur un projet de schéma directeur de sécurité/sûreté présenté au CHSCT de l’établissement le 29 septembre dernier.
L’objet de ce schéma directeur vise à doter l’établissement d’un ensemble de dispositifs et d’équipements (vidéosurveillance, contrôle d’accès…) gérés depuis un nouveau poste central de sécurité (PCS) créé à cette occasion, et mettre en place une organisation de travail et des procédures en capacité de répondre à des exigences nouvelles. Et tout cela devrait prendre forme rapidement car les premiers travaux sont prévus au premier trimestre 2018 !
Ce projet, en l’état, va avoir des répercussions majeures sur l’organisation de travail du service accueil et surveillance. Ainsi le 25 septembre, quelques jours seulement avant le CHSCT, le personnel du service de nuit du musée (8 agents) a appris brutalement que leur service serait purement et simplement dissous au printemps prochain, et leurs missions confiées à un prestataire de sécurité privé chargé d’assurer la sécurité de l’ensemble du site 24h/24 et 7J/7 !
Un choc et une incompréhension totale pour ces agents, attachés à des missions bien particulières et rodés aux spécificités du site, qui pensaient naturellement avoir à jouer un rôle essentiel dans la future organisation. Mais à l’évidence la Direction de l’établissement n’entend pas s’embarrasser de ce genre de considérations.
Pourquoi des solutions aussi radicales ?
Le musée de Sèvres, comme beaucoup des services du ministère, souffre d’un mal profond qui porte le nom de sous-effectif, et qui affecte durablement le fonctionnement du musée avec des conditions de travail des personnels et d’accueil du public dégradées, la durée de vacance des postes ne faisant qu’ajouter à un climat général pesant. Et le départ sur une même période des principaux responsables de l’accueil et surveillance n’a été qu’un avatar supplémentaire au marasme ambiant. Bref, au musée de Sèvres le sentiment d’abandon domine.
Aujourd’hui la situation est telle que l’établissement ne croit même plus dans la capacité des services du ministère à prendre en compte les besoins et les quelques postes nécessaires pour mettre en place son projet. Et préfère tout de go se convertir aux « vertus » du libéralisme en externalisant des missions pourtant fondamentales.
Que deviendraient les agents de nuit ?
Plusieurs « possibilités » leur sont proposées :
– intégrer le service de jour C’est le secret espoir de l’administration, qui voit là l’occasion inespérée de renflouer à bon compte ses effectifs du service de jour. S’agissant d’agents ayant choisi le travail de nuit par choix, l’administration se berce très probablement d’illusions.
– faire valoir leurs droits à la mobilité pour le cas échéant retrouver des postes de nuits En somme se séparer à l’amiable, comme dans les cas de désaccord. Sauf qu’en l’espèce les agents n’ont rien à se reprocher, lesquels sont tout simplement empêchés de poursuivre leurs fonctions au sein du musée, non pas en raison de la disparition de celles-ci, mais parce qu’on souhaite tout bonnement les privatiser ! Donc s’en remettre à une mutation comme alternative, avec l’appui du SRH, avec de vagues promesses de primes à la clé !? Comme si les postes de nuit vacants courraient les rues ?
– intégrer le service de nuit nouvelle version ! Ni plus ni moins que de travailler aux côtés de la société privée aux conditions fixées pour celle-ci, avec des vacations de 12h30 et 40 mn de pause par nuit avec une démultiplication des nuits à effectuer. Le cynisme et le mépris à l’état pur ! Le ministère lui-même ne reprend pas à son compte cette piste « foireuse ».
Une externalisation au prix fort pour la Cité !
Le coût annuel de la prestation est estimé à 350 000 € pour un service 7J/7 et 24H/24 (200 000€ pour la partie nuit et 150 000 € pour le jour). Une coquette somme à trouver par temps de disette budgétaire. A croire qu’il pleut des euros et qu’il suffit de se pencher pour les ramasser ! Cette dépense en crédit de fonctionnement serait entièrement à la charge de la Cité de la Céramique, alors même que le budget de l’établissement n’a rien de florissant. Comme nul ne saurait trouver un tel pactole au pied levé, la construction du budget 2018 va ressembler à un exercice de haute voltige du genre tour de passe-passe, et il y a fort à parier que des coupes sombres et autres tours de vis douloureux seront opérés dans les différents services. Au final la potion risque d’être particulièrement amère pour les personnels de la Cité.
Mais ce n’est pas tout, et la note pourrait être encore beaucoup plus salée pour l’établissement. Ainsi pour faciliter la mutation des agents vers d’autres sites la Direction locale serait prête à renoncer à leurs postes budgétaires et perdre les ETP correspondants !
Et de nous interroger : messieurs et mesdames les gestionnaires de la Cité, que cache cette fuite en avant ?
Il y a quelques mois la CGT Culture a dû intervenir auprès du ministère pour s’assurer que le musée, menacé de fermeture du fait d’une insuffisance d’effectifs, poursuivrait son activité. Aujourd’hui l’établissement est prêt à se délester de précieux postes, et introniser une société privée ! Et demain qu’adviendra-t-il de ce qui restera du service accueil et surveillance si le musée est amené, en 2020, à fermer pour travaux comme il est envisagé ?
Sur le volet social de ce dossier les personnels et leurs représentants ont été délibérément tenus à l’écart, et abusés par de fausses assurances quant au maintien de leurs fonctions. Le constat est sans appel : le calendrier retenu par l’administration pour mettre en œuvre son projet se fait à marche forcée, ne ménage aucune place pour la concertation, et mise sur l’effet de sidération des personnels.
Pour preuve, lors du CHSCT du 29 septembre l’administration a refusé que le point soit vu dans un premier temps pour information, ce qui a entraîné un vote unanime contre de la part des représentants des personnels sur ce point. Et quelques jours seulement après le CHSCT, l’administration convoquait les agents pour des entretiens individuels pour connaître leur choix !
La CGT ne lâchera rien ! Elle réaffirme son opposition catégorique à cette externalisation scélérate !
Paris le 26 octobre 2017